MOURIR, EN 1782

Neuf ans après son mariage, Pierre Rigou (voir panneau précédent) fait son testament nuncupatif, c’est à dire écrit par le notaire sous sa dictée.
 Il partage ses biens entre sa femme et ses trois filles mineures.

 Le testament de Pierre Rigou est un acte civil mais aussi religieux.
 Toujours domestique au château de Lajaumont, il veut se mettre en règle avec sa conscience et fera dire des messes et distribuer des aumônes pour 210 livres.
 Le curé de Linards recevra durant l’année de son décès 180 livres pour faire 50 services (offices qu’on célèbre pour les morts) et des messes basses (qui se disent sans chant), puis 30 livres l’année suivante pour d’autres messes basses.
 Le prêtre recevra également 30 livres à distribuer aux pauvres de la paroisse.

 Il répartit ensuite son « entière hérédité » (sa succession) entre ses 3 filles.
 A défaut de fils aîné, il institue sa fille aînée son héritière universelle : c’est elle qui recueille tous les biens du défunt.

 Ses filles n’étant bien entendu pas mariées, elles n’ont pas reçu leur part successorale sous forme de dot et rentrent donc dans la succession. Les deux plus jeunes, ses héritières particulières, ne recevront qu’une partie des biens, chacune 1200 livres en trois fois lorsqu’elles seront majeures ou mariées.

 Si par la suite un enfant naissait de sa femme, mais déjà conçu au moment de son décès (un posthume), celui-ci recevrait aussi 1200 livres dans les mêmes conditions que ses soeurs.
 Pour éviter toute contestation il prévoit le cas où viendrait à décéder l’héritière universelle sans enfant légitime (sans hoir). Elle serait remplacée par sa deuxième fille, puis la plus jeune, sa soeur et enfin son neveu.

 Sa femme qui n’est pas héritière reçoit l’usufruit de ses biens.
 Mais le mariage de l’héritière universelle mettra fin à cet usufruit. En attendant elle devra nourrir ses enfants et payer les charges dues sur ces biens.

 Il lui lègue également 120 livres si elle reste veuve (gardant la viduité).

 Un enrichissement certain :
 A leur mariage, Pierre Rigou et son épouse héritaient théoriquement de 1350 livres, valeur du domaine des parents de Pierre et de la dot.

 Par son testament il dispose d’au moins 2830 livres (héritages et dons). A cette somme il faut ajouter les biens qui reviendront à l’héritière universelle et qui sont au moins équivalents aux 1200 livres données à ses deux soeurs.
 On peut estimer sa succession à environ 4000 livres.

Transcription du testament du 23 décembre 1782 (ADHV 4 E 43)

Par devant nous m° Jean Louis Chaussade, notaire royal héréditaire en la sénéchaussée de Limoges, soussigné en présence des témoins bas nommés, le vingt cinquième décembre mil sept cent quatre vingt deux, environ les deux heures après midi au château noble de Lajaumont, paroisse de Linards Haut Limousin, dans une chambre basse dudit château fut présent Pierre Rigou, domestique au présent château. Lequel volontairement en vue de la mort étant malade de corps mais sain d’esprit et en ses bons sens, mémoire et entendement a fait daté et ordonné son testament nuncupatif et disposé de ses biens comme s’en suit:
Premièrement le testateur veut qu’il soit pris de ses biens la somme de cent quatre vingt livres pour la rétribution de cinquante services et le restant en messes basses à son intention. Le tout dit et célébré dans l’an de son décès par Mr le prieur de Linards et à lui payable audit temps. Plus veut qu’il soit pris de ses biens la somme (de) trente livres aussi en messes basses à son intention pour être dites l’année ensuite et qu’il soit distribué par Mondit, Sr curé de Linards, pareille somme de trente livres que le testateur donne et lègue aux pauvres les plus nécessiteux de ladite paroisse, payable dans l’an de son décès.
Le testateur déclare être marié avec Léonarde Raineix et que dudit mariage il y a trois filles nommées Marguerite, autre Marguerite et Anne Rigou ses filles et de ladite Raineix. Auxquelles Marguerite, seconde du nom et Anne Rigou, ses filles, à chacune d’elles le testateur donne et lègue, pour tous droits, la somme de douze cents livres, payables à chacune d’elles en six pactes égaux dont le premier à établissement ou majorité, le second un an après et ainsi s’ensuivant et sans intérêts qu’après l’échéance de chaque pacte. Mais jusqu’ici veut que ses filles soient nourries logées et entretenues dans les biens de son hérédité en travaillant de son pouvoir au profit de son héritière bas nommée, au moyen de quoi le testateur institue lesdites Marguerite et Anne Rigou, ses filles puînées, chacune ses héritières particulières et avec ce, veut qu’elles n’aient rien plus en ses biens et hérédité.
Le testateur donne et lègue aux posthumes dont sa femme peut être enceinte, à chacun la somme de douze cents livres, payables aussi en six parties égaux de deux cents livres chacun, aux mêmes termes, parties, clauses et conditions que les legs faits à ses filles, au moyen de quoi le testateur institue lesdits posthumes chacun ses héritiers particuliers et avec ce, veut qu’ils n’aient rien plus en ses biens.
Le testateur donne et lègue à ladite Raineix, sa femme, la somme de cent vingt livres, payables à sa volonté et l’usufruit et jouissance et revenu de tous ses biens de lui testateur en meubles et immeubles, jusqu’au mariage de son héritière bas nommée, en payant les charges annuelles et nourrissant lesdites filles et posthumes et en par elle gardant la viduité et non autrement et au cas où elle convolerait à révoquer les legs.
Et au restant de tous ses biens meubles et immeubles droits, voix, noms, raisons et actions, le testateur a fait créé, institué et de sa bouche nommé, comme nomme et institue, pour son héritière universelle, seule et pour le tout, ladite Marguerite Rigou, sa fille aînée, pour avoir et recueillir son entière hérédité en propriété au décès du testateur et ses usufruits après la jouissance de sa dite mère en payant et acquittant les charges de son hérédité et autres de son testament. Et au cas où ladite Marguerite Rigou héritière universelle viendrait à décéder sans hoirs légitimes, le testateur veut que son entière hérédité cède et revienne au profit de ladite Marguerite, sa seconde fille. Et encore en ladite Marguerite Rigou, sa fille cadette, viendrait à décéder aussi sans hoirs le temps légitime. Et veut également que ladite entière hérédité cède et revienne à ladite Anne Rigou, plus jeune. Et celle-ci venant à décéder, il veut au surplus que ladite hérédité revienne et cède au profit d’Anne Rigou, sa soeur, veuve Perpillou où à son défaut à Pierre Perpillou, son fils, demeurant à Sivergnat paroisse de St Bonnet. Le testateur casse, révoque et annule tous autres testaments, codicilles et autres dispositions antérieures adhérant à celui-ci son présent testament qu’il veut lui servir de disposition de dernière volonté, voulant que s’il ne peut valoir par sa forme il tienne et vaille comme codicille et autrement en la meilleure forme duquel lui avons fait lecture a dit être son intention, y persiste et nous en a requis acte. Concédé en présence de M° Jacques Degay de Vernon prêtre, prieur curé de Linards, Léonard Dunouhaud, artisan, demeurant au bourg et paroisse de Linards, Léonard Pijou, Léonard Arfonssou, Jean Reillat et François Ruaud, laboureurs au lieu de Chazelas, même paroisse. Témoins connus requis et appelés qui avec ledit testateur dit ne savoir signer de ce interpellés lecture faite.
Signé : De Gay de Vernon prieur de Linards, Dunouhaud, Chaussade

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