Aujourd'hui vingt-quatrième jour du mois de décembre mil
sept cent quatre vingt trois à huit heures du matin, au bourg paroissial
de Linars Haut limousin, par-devant nous m° Jean Louis Chaussade notaire
royal héréditaire en la sénéchaussée
de Limoges soussigné, est comparu Léonarde Deblois veuve
de Léonard Tuilléras, tourneur demeurant au village de Baubiat
paroisse dudit Linars, laquelle nous a dit et exposé que sondit
feu mari, par le contrat de mariage de Catherine Tuilléras sa fille
(de son second mariage avec feu Marie Pingou) avec Denis Arnaud, du 20
février dernier passé devant le notaire royal soussigné
contrôlé, aurait fait donation à sadite fille de la
moitié de tous et un chacun ses biens meubles et immeubles présents
et à venir, sous le support de la moitié des charges et dettes
actives et passives, à condition expresse de payer la moitié
des légitimes ou constitutions qu'il ferait suivant ses facultés
à ses autres enfants et à ladite comparante, qu'en outre
il avait promis par le même contrat de ne faire d'autre héritier
universel que la future épouse sadite fille à laquelle il
promit de garder sa succession, sans cependant borner ses libéralités
en faveur des autres enfants, se réservant toujours de disposer
de ses biens à son gré et volonté, en instituant toujours
sadite fille son héritière universelle, et que ledit Tuilléras
étant venu à décéder le quatre du présent
mois, huit jours après son décès ledit Denis Arnaud
et ladite Catherine Tuilléras, ne voulant se porter héritiers
de leur père et beau-père ni accepter l'hérédité,
ont quitté la maison dudit feu Tuilléras et même ont
pris le parti ainsi qu'elle en demeure [avertie] d'obtenir des lettres
de répudiation de l'hérédité dudit Tuilléras
père. Dans cette circonstance, la comparante voulant dès
à présent éviter toute confusion d'hérédité
et prévenir les réclamations que ses enfants, lesdits Arnaud
et sa femme et les créanciers pourraient faire contre elle, elle
désire de faire constater le mobilier que son mari a laissé,
en conséquence nous a requis de nous transporter ce matin dans la
maison domiciliaire dudit feu Tuilléras dans laquelle il est décédé,
pour faire inventaire du mobilier, titres, papiers et documents dépendant
de sa succession, sans qu'elle entende par raison de ce prendre aucune
qualité qui lui soit de préjudice et sous la réserve
expresse qu'elle fait de tous les droits, actions, prétentions et
reprises qu'elle a à exercer contre ladite hérédité,
tant en vertu de son contrat de mariage qu'autrement, sous l'offre qu'elle
fait de faire trouver des parents dudit feu Tuilléras et des siens
pour être présents audit inventaire, à fin d'éviter
des frais judiciaires qui tomberaient en pure perte sur les enfants dudit
feu Tuilléras et sur le rapport d'un expert qu'elle y fera aussi
trouver, duquel nous prendrons le serment au cas requis, ce que nous lui
avons accordé et sur son requis lui avons donné acte de son
exposé et a déclaré ne savoir signer de ce interpellée.
CHAUSSADE
Et advenant ledit jour vingt quatrième décembre mil sept
cent quatre vingt trois à neuf heures du matin nous notaire royal
soussigné, accompagné de nos témoins bas nommés,
nous sommes portés audit village de Baubiat dans la maison où
est décédé ledit feu Tuilléras, où étant
avons trouvé Léonard Tuilléras, laboureur au même
lieu frère du défunt, Jean Garat tisserand demeurant au lieu
du Puylarousse paroisse dudit Linars neveu du défunt, Pierre Denardou
laboureur au village du Nouhaud même paroisse, neveu à la
mode de Bretagne du défunt, Charles Pingou laboureur au village
de Sous le Croux même paroisse beau-frère du défunt,
Jean Deblois laboureur au village de Bourdelas paroisse de St Méard
frère de la veuve et beau-frère dudit feu Tuilléras,
Léonard Pinchou laboureur au même lieu cousin au troisième
degré de ladite Deblois et de son feu mari et Pierre Gourserol laboureur
du même lieu leur beau-frère, à tous lesquels avons
fait lecture de l'exposé de ladite Deblois, ce fait ont dit vouloir
assister audit inventaire qu'elle se propose de faire faire et avons aussi
fait rencontre de Jean Janot, laboureur au village du Nouhaud et Pierre
Rivet laboureur au village de Sous le Croux paroisse dudit Linars, experts
appelés par ladite Deblois de l'aveu desdits parents, auxquels avons
aussi fait lecture de l'exposé de ladite Deblois, ont répondu
accepter la commission et […] au requis desdits parents avons d'eux reçu
le serment au cas requis après qu'ils nous ont dit être âgés,
savoir ledit Rivet de soixante six ans et ledit Janot de cinquante deux,
de laquelle prestation de serment, au requis de ladite veuve, parents et
experts nous avons concédé acte et ont dit ne savoir signer
de ce interpellés.
CHAUSSADE
Et à l'instant ladite veuve Tuilléras nous a représenté
et auxdits parents les habits du défunt, consistant en une veste
et une paire de culottes en drap de pays mélangé en bleu
et un gilet de molleton mi-usés, deux autres mauvaises vestes, deux
mauvaises paires de culottes et un mauvais gilet de drap de pays presque
usés, un couteau, une tabatière de bois, un petit mouchoir,
un mauvais chapeau, une paire de bas de fil et une de laine, le tout estimé
dix livres, cy - 10£
Six chemises de toile commune dont quatre fort mauvaises et les autres
deux mi-usées estimées par lesdits experts trois livres,
cy - 3£
Plus un mauvais lit dont le [coutil] commun pour la couette et duvet
presque usé garnis de vingt cinq livres de plumes dans la couette,
le chevet de balle d'avoine, un châlit façon de village avec
une mauvaise couverte de serge de pays, six livres, cy - 6£
Une petite armoire dont les côtés et dessus sont vieux,
les portes presque neuves fermant à deux battants d'un loquet en
fer et un en bois estimée trois livres, cy - 3£
Une table de trois planches de six pieds et deux bancs, une huche à
pétrir faite de planches de chêne, trois chaises […] de paille
estimées par lesdits experts à la somme de dix livres, cy
- 10£
Un chaudron de cuivre rouge de deux seaux, une poêle à
frire, une autre à faire des crêpes, un trépied en
fer, un mauvais pot de fonte contenant deux seaux, un autre presque neuf
d'un seau* et demi et un autre d'un demi-seau, avec leurs anses de fer,
sans couvercle, un poêlon et une cuiller dont la coupe de cuivre
jaune et la queue de fer, une crémaillère à onze anneaux
de fer, le tout estimé vingt livres, cy - 20£
Deux seaux en bois cerclés de fer servant à porter l'eau,
un godet, un autre seau à faire la pâte de blé noir,
un tamis en [fraise], un marteau à ferrer les sabots, un autre et
une forge à battre les faux, deux faux à faucher, quatre
faucilles estimés six livres, cy - 6£
Un tour à faire les chaises, deux vilebrequins, deux ciseaux,
une hache, une herminette, deux petites scies, un couteau à parer,
un racloir, une petite tarière et une vrille estimés six
livres, cy - 6£
Une cuiller à faire les sabots, deux hoyaux, deux pioches, deux
hachereaux mi-usés, une mauvaise cognée, une scie, une fourche
à trois pointes fort petite, une autre plus grande, trois mauvais
paillons, deux autres mi-usés, deux paniers, un panier à
fromage, un crible, un râtelier à mettre le pain, un seau
à mettre la crème de lait, deux paires de dévidoirs
estimés par lesdits experts à la somme de sept livres, cy
- 7£
Un coffre mi-usé dans lequel s'est trouvé deux draps
de lit provenant de Charles Pingou en toile d'étoupe, deux serviettes
[…], deux serviettes de toile métis, six draps de lit y compris
deux servant au lit de la veuve en toile d'étoupe, un linceul de
[brin] avec une grosse dentelle au milieu, le tout estimé par lesdits
experts à la somme de vingt livres, cy - 20£
Cinq écuelles de terre de pays, un petit broc et un grand de
même, un petit pot et quatre mauvaises cuillers d'étain commun
estimés dix livres, cy - 10£
Et vu qu'il est déjà une heure après midi, nous
nous sommes retirés et avons remis la continuation des présentes
à deux heures de relevée où toutes parties intéressées
demeurent assignées, en présence de Sr Isaac Dupuy praticien
et Léonard Sautour sergent demeurant au bourg paroissial de Linards,
témoins connus, requis et appelés soussignés avec
nous et lesdits parents et experts ont déclaré ne savoir
signer de ce interpellés lecture faite.
DUPUY SAUTOUR CHAUSSADE
Et advenant les deux heures de relevée dudit jour vingt quatre
décembre mil sept cent quatre vingt trois au requis de ladite veuve
Tuilléras, en présence desdits parents et experts , avons
continué ledit inventaire et sommes entrés dans une chambre
à côté de la cuisine de ladite maison de la succession
dudit feu Tuilléras où étant la veuve nous a représenté
et aux parents un mauvais lit monté sur des piquets et morceaux
d'ais garnis de paille, d'une mauvaise couette où il y a un peu
de balle d'avoine, laquelle couette on a dit appartenir audit Charles Pingou,
plus nous a représenté six aulnes de coutil commun et une
pièce non foulée, une paillasse à repasser la farine,
une ruche à mettre les abeilles, cinq poules et un coq, un mauvais
berceau, huit livres de mauvais chanvre broyé, trois livres pesant
de laine lavée, le tout estimé par lesdits experts à
la somme de dix libres, cy - 10£
De là, accompagnés comme dessus, avons été
au grenier de ladite maison où s'y est trouvé trois setiers
blé noir, deux setiers de blé seigle, deux quartes d'avoine,
une quarte de chènevis mesure de St Léonard, cinq mauvais
sacs d'étoupe, deux […] ou […] à mettre le grain, quatre
sacs de châtaignes séchées, un de glands, tout quoi
a été estimé avec deux quartes de pommes communes
sèches, estimé le tout à la somme de vingt quatre
livres - 24£
De là sommes redescendus dans ladite chambre où lesdits
parents et veuve nous ont fait voir qu'il y a environ six sacs de châtaignes
vertes dont il y en a les trois quarts de pourries, le quart restant nécessaire
à la nourriture des mineurs.
De là, accompagnés comme dessus, avons été
à la grange dépendant de ladite hérédité
où la veuve a représenté deux vaches dont une fort
vieille et l'autre suitée d'un petit veau, estimées par lesdits
experts cent vingt livres, cy - 120£
Onze brebis ou agneaux d'un an estimés vingt deux livres, cy
- 22£
Une vieille ânesse estimée trois livres - 3£
Une charrette avec ses roues […], un tombereau, un joug garni de ses
lanières et ferrements, un harnais à labourer garni de son
contre oreille, soc et [chevalier], une perche avec son [chausson], deux
échelles à voiturer le foin, une paire de cordes à
même fin, deux fléaux, un râteau, deux fourches de bois,
une échelle portative, tout quoi a été estimé
trente livres, cy - 30£ - Total - 300£
Plus dans le grenier à foin soixante quintaux de foin et cinquante
bottes de paille que lesdits parents ont dit être nécessaires
pour la nourriture des bestiaux étant dans ledit bien, ainsi qu'environ
dix sacs de raves
De là avons été au jardin de la même succession
où fut trouvé trois ruches à miel garnies de leurs
abeilles dont la moitié appartient audit Léonard Tuilléras
cadet, conséquemment n'ont voulu les estimer.
De là sommes revenus à la maison domiciliaire, où
étant ladite veuve nous a représenté un paquet de
papiers, un petit dossier de procédure en défens contre Sr
Jean Piquet, coté lettre A
Autre dossier de procédure entre Jean Tuilléras et Jean
Pingou coté lettre B
Copie du contrat de mariage dudit feu Léonard Tuilléras
avec Léonarde Mazeau du 26 février 1753 passé devant
Martinot notaire coté lettre C
Copie de transaction passée entre Jean Léonard Tuilléras
et Charles Pingou du 19 juin 1772 passé devant Chaussade notaire
coté lettre D
Autre du partage fait entre Léonard et autre Léonard
Tuilléras le 31 Xbre 1772 devant le même notaire coté
lettre E
Autre d'une quittance par Jean Janot audit Tuilléras le 30 9bre
1775 devant Chaussade notaire coté F
Copie d'une vente faite par Pierre Duris audit feu Léonard Tuilléras
du 10 mars 1770 devant Chaussade notaire coté lettre G
Autre d'une quittance par Jean Janot audit Tuilléras le 30 avril
1780 devant le même notaire coté H
Copie d'une vente faite par Pierre Delaboulandine audit feu Tuilléras
le 13 8bre 1782 devant Chaussade notaire coté lettre J
Plus une quittance de ferme de [divers] de la Peyrassade du 9 8bre
1782 signée La Bachelerie de Châteauneuf coté K
Et enfin une quittance de rente du ténement de Sous le Croux
du 4 8bre 1779 signée Dupont veuve Martin coté lettre L
Tous lesquels biens meubles, grains, effets, bestiaux, titres et papiers
ladite Léonarde Deblois a dit être ceux délaissés
par ledit feu Tuilléras qui sont venus à sa connaissance,
dont elle s'est chargée pour les rendre à qui il appartiendra
sous les réserves et exceptions faites audit exposé, affirmant
et déclarant par ces présentes moyennant serment n'avoir
saisi ni retiré rien autre chose qui appartienne à l'hérédité
de sondit feu mari, déclarant que s'il en venait à sa connaissance
elle les ferait mettre par addition au bas des présentes, laquelle
déclaration lesdits parents comparants ont d'une commune voix affirmé
être sincère et véritable, duquel inventaire ladite
Deblois nous a requis acte pour servir et valoir que de raison, que lui
avons concédé, fait et clos à cinq heures du soir
audit village de Baubiat, en présence dudit Sr Jean Dupuy et Léonard
Sautour sergent demeurant audit Linards soussignés, nos témoins
exprès appelés et ladite veuve, parents et experts ont déclaré
comme autre fois ne savoir signer de ce interpellés lecture faite
DUPUY SAUTOUR CHAUSSADE
Contrôlé à Linards le sept janvier 1784 reçu
deux livres, insinué reçu trois livres dix sous pour deux
livres dix sols CHAUSSADE
Document joint :
A monsieur le juge du marquisat de Châteauneuf
Supplie humblement Léonard Tuilléras, laboureur au village
de Baubiat paroisse de Linards, tuteur décerné par justice
aux enfants mineurs de feu Léonard Tuilléras, disant que
par jugement du treize du courant, il aurait été réputé
tuteur de Léonard, Marguerite et Jean Tuilléras ses neveux,
fils dudit feu Léonard et de Léonarde Deblois, et que pour
ne faire confusion de ses biens avec ceux desdits mineurs et encore pour
éviter tout reproche de leur part, il aurait été conseillé
de vous donner la présente requête, aux fins que ce considéré
il vous plaise, Monsieur, permettre au suppliant de faire faire inventaire
du mobilier dépendant de la succession dudit feu Léonard
Tuilléras ou faire faire récolement de celui qui a pu être
fait par ladite Deblois et en outre lui permettre aussi de faire constater
procès verbal des bâtiments et biens dépendants de
la même succession par le ministère de tel notaire qu'il vous
plaira nommer à cet effet et l'autoriser à appeler un expert
et de lui recevoir le serment au cas requis, à ces fins permettre
d'assigner par une affiche publique à la principale porte de l'église
de Linards pour que les intéressés audit inventaire et procès
verbal y assistent au jour et heure indiqués par l'assignation et
affiche, faute de quoi qu'il soit procédé tant à leur
absence que présence, et ferez bien.
BARGET procureur du suppliant.
Acte de la présente requête au suppliant et à lui
permis de faire faire inventaire du mobilier et procès verbal des
immeubles dépendants de la succession de feu Léonard Tuilléras,
à ces fins permis d'assigner tous parents et intéressés
auxdits inventaire et procès verbal par vue sur l'affiche au jour
indiqué, à l'effet de la faction desquels inventaire et procès
verbal nous avons commis et nommé la personne de m° Jean Louis
Chaussade, notaire royal à Linards, que nous autorisons à
nommer tel expert qu'il avisera, duquel nous l'autorisons aussi à
recevoir le serment au cas requis, fait à Châteauneuf le vingt
mars mil sept cent quatre vingt quatre
PIGNE juge
Affiche :
On fait savoir à tous ceux qu'il appartiendra que par vertu
de la requête présentée à M. le juge de Châteauneuf
et de son ordonnance bas-[…] en date du jour d'hier signée de M.
Pigne, juge, il sera fait inventaire des meubles effets, grains et bestiaux,
titres et papiers dépendant de la succession de feu Léonard
Tuilléras et au procès verbal des immeubles et bestiaux par
lui délaissés, vendredi prochain que l'on comptera le vingt
six mars, à huit heures du matin et jours suivants par le ministère
de m° Jean Louis Chaussade notaire royal à Linards commis à
cet effet par ladite ordonnance, lequel sera assisté d'un expert
duquel il est autorisé à recevoir le serment au cas requis,
auquel inventaire et procès verbal il sera procédé
à la requête de Léonard Tuilléras, tourneur
demeurant au village de Baubiat paroisse de Linards, tuteur décerné
aux enfants mineurs dudit feu Léonard Tuilléras nommés
Léonard, Marguerite et Jean Tuilléras et faute pour les intéressés
de se trouver au jour et heure de ladite assignation leur avons déclaré
qu'il y sera procédé tant en leur absence que présence,
sous la réserve que fait le requérant de respecter tous ses
frais et avances, fait à la principale porte de l'église
de Linards par nous Jean Barget huissier royal soussigné, reçu
et immatriculé aux greffes des cours présidiale et sénéchale
de Limoges résidant au bourg et paroisse de Linards, dont acte le
vingt un mars mille sept cent quatre vingt quatre. BARGET