ADHV 5FK16 - Fonds Bosvieux - Abbaye de Blessac - Enquête du 18/06/1530

Contexte : Le prieuré de Blessac, dépendant de l’ordre de Fontevrault, se trouve au début du XVI° siècle sous le contrôle de la famille des seigneurs d’Aubusson. En 1529, la prieure de Blessac est Françoise d’Aubusson, branche de Villac, depuis plusieurs années ; le prieur du même monastère, qui en gère les biens temporels et revenus, est depuis 3 ou 4 ans Jean d’Aubusson. Il fait scandale en menant une vie dissolue et en détournant à son usage les revenus des religieuses. Le frère de Jean, Charles d’Aubusson baron de la Borne, est réputé vivre maritalement avec la prieure Françoise et en avoir des enfants, tandis que ses amis font de même avec d’autres religieuses ; il est également accusé de divers crimes. Une enquête provoquée par la conduite scandaleuse de frère Jacques d'Aubusson, prieur dudit prieuré, avait déjà eu lieu en 1476.
Le 4 février 1529, l’abbesse de Fontevrault Renée de Bourbon obtient du Parlement de Paris l’envoi d’enquêteurs à Blessac relativement aux « assemblées illicites, port d’armes, battements, ravissements, homicides, menaces, assauts, invasions, malversations, dissolutions, vie lubrique, scandales et autres cas et maléfices … »
L’enquête menée par deux prêtres se déroule dans des conditions difficiles du 7 au 13 juillet 1530 ; elle confirme les accusations portées contre les Aubusson, uniquement au sujet du prieuré de Blessac. C’est la transcription de cette enquête qui suit. Elle conduisit à la mise sous séquestre des revenus du prieuré en attendant sa réforme.
Cependant une autre enquête était menée parallèlement par un sergent royal, du 10 au 15 juillet, relativement aux accusations de meurtres, viols et autres violences « séculières » portées contre Charles d’Aubusson baron de la Borne. Celui-ci fut condamné à la décapitation le 23 février 1533.

Transcription manuscrite, 44 pages
CXVIII - Enquête instituée par les visiteurs de l'ordre de Fontevrault sur les déportements du prieur et de la prieure de Blessac, Jean et Françoise d'Aubusson - Juin 1530

L'an mil cinq cent trente et le dix huitième jour du mois de juin, à nous frères Jehan Lamy et François Pelletier, prêtres religieux réformés de l'ordre de Fontevrault, par maître Martial Deschamps, licencié en droits, solliciteur et procureur de notre très révérende dame et souveraine mère, madame Renée de Bourbon, abbesse du monastère et ordre dudit Fontevrault, sujet sans moyen au saint siège apostolique, comme nous est apparu par lettres de sa procuration en date du neuvième jour de mai audit an, nous ont été baillées certaines lettres de commission desquelles la teneur s'ensuit :
[Ces lettres en latin commettent les deux prêtres ci-dessus nommés à la réformation du prieuré de Blessac; elles sont en date du 16 juin 1530]
Nous requérant ledit Deschamps procureur que eussions à nous transporter sur les lieux nécessaires pour vaquer à l'exécution de ladite commission, ce que lui accordâmes.
Et dès lors en sa compagnie et de sages et discrètes personnes maîtres Jehan Pradal, licencié en chacun droit, lieutenant général pour le Roi notre sire à bailliage de Montferrand et Bas-Auvergne, Roger Pasmole greffier dudit Monferrand, Gabriel Cholier sergent royal, Pierre Tranchant et François Genille, nous transportâmes au lieu et ville de Crocq en Auvergne, où arrivâmes le jeudi septième jour de juillet audit an, pour exécuter notre commission; lequel jour ouïmes et interrogeâmes secrètement sur certains faits et articles à nous baillés Jehan Fradesche, laboureur demeurant au village de Herfeuille paroisse de St Pardoux, âgé de trente cinq ans ou environ, lequel, après le serment par lui fait de déposer et dire vérité, dit qu’il était fermier d’une chapelle étant audit village de Herfeuille, dépendant dudit prieuré de Blessac, et l’avait assencé pour cette présente année de maître jean d’Aubusson, soi-disant prieur dudit Blessac, cinquante et cinq setiers de blé. Interrogé si c’était tout le revenu de ladite chapelle, dit que non et qu’elle valait outre dix ou douze livres en argent, à laquelle somme la tenait le vicaire dudit St Pardoux, lequel n’a su pour lors nommer, à la charge de dire les messes et y faire tout autre service requis et accoutumé y être fait. Interrogé sur le gouvernement des religieuses, prieure et convent dudit Blessac, dit qu’il avait plusieurs fois été audit prieuré et entré ès logis desdites religieuses, lesquelles toutefois  ni aucune d’icelles ne sut ledit déposant nommer lors, mais qu’il avait bien ouï dire audit lieu de Crocq, Herfeuille, Blessac et ailleurs que lesdites religieuses avaient mauvais bruit et vivaient lubriquement, et entre autre que la prieure dudit lieu avait eu trois ou quatre enfants de Charles d’Aubusson, seigneur de la Borne, lequel il dit bien connaître parce que souvent l’a vu audit lieu de Blessac avec lesdites religieuses, en la ville d’Aubusson et ailleurs, et que le commun bruit était qu’il entretenait ladite prieure et qu’il avait eu plusieurs enfants d’elle. Interrogé s’il savait autres personnes qui entretinssent lesdites religieuses ou aucune d’icelles, dit que non, mais que tout le monde y entrait, par manière de dire, tant gentilshommes que autres qui y voulaient entrer.
Item lesdits jour et an, Jean Galicher, lieutenant de ladite ville de Crocq et y demeurant, âgé de quarante ans ou environ, après le serment par lui fait de dire et déposer vérité, et par nous interrogé sur lesdits articles, dit qu’il est bruit commun audit lieu de Crocq, à Felletin, à Aubusson et autres lieux circonvoisins que le baron de la Borne a eu plusieurs enfants de la prieure de Blessac et l’entretient ordinairement comme si c’était sa femme, qu’il va et vient audit prieuré de Blessac aussi souvent et familièrement comme chez lui. Pareillement que le frère dudit baron hante communément audit prieuré et avec lesdites religieuses, plusieurs desquelles il dit mal vivre et en si grande lubricité, ordure et vilenie de luxure que tout le pays d’entour et à plus de dix lieues la ronde en est scandalisé et mal édifié, par manière que ledit déposant, à toutes les interrogations qu’on lui faisait sur la vie et conversation desdites religieuses, disait avec grandes adjurations : crucifigatur, digne sunt cruxifigi. Dit aussi en notre présence et de plusieurs autres audit Jean Fradesche, témoin ci-dessus examiné, telles paroles ou semblables : « Viens-ça. N’as tu pas été compère des religieuses de Blessac ? », lequel Fradesche fit réponse que non ; auquel ledit Galicher répliqua en disant : « Tu as menti, tu l’as été plus de quatre fois, et si tu sais bien que la prieure et autres religieuses dudit lieu paillardent ordinairement et vivent méchantement. Pourquoi le cèles-tu ? Dis le hardiment, car aussi bien tout le monde le sait. »
Item ledit jour et an, messire Michel Mondeillet, prêtre chanoine de Crocq, âgé de quarante et cinq ans ou environ, après le serment par lui fait de dire et déposer vérité, fut par nous interrogé s’il connaissait les religieuses dudit lieu de Blessac, lequel déposant dit que non, pas bien, mais que en avait autrefois vu aucune d’icelles sur les champs à l’ébat, dont n’est recors ledit déposant du temps et lieux. Dit aussi qu’il dépose en voir souventes fois ouï parler en très mauvaise sorte, mêmement que la commune renommée était audit lieu de Crocq et partout ailleurs où il a ouï parler desdites religieuses, qu’elles vivent d’une méchante et lubrique vie et non comme religieuses, mais plutôt comme filles ou femmes abandonnées, et que audit lieu de Blessac était un bourdeau public, et que lesdites religieuses avaient eu plusieurs enfants. Interrogé s’il savait qui hantait avec elles, dit que on tenait communément que le seigneur de la Borne entretenait la prieure dudit lieu, et qu’elle avait eu de lui aucuns enfants, dont le déposant n’a su dire quels ni combien. Interrogé s’il savait aucune chose du revenu dudit prieuré de Blessac, dit que à la vérité il n’en savait rien, for de une petite chapelle que le déposant dit être dépendant dudit prieuré, distant de ladite ville de Crocq de douze lieues ou environ, laquelle dessert à présent le vicaire de St Pardoux, à la charge de douze livres tournois qu’il en donne par chacun an au prieur dudit Blessac. Dit aussi que outre ledit argent, y a certaine dîme appartenant à ladite chapelle valant communes années cinquante ou soixante setiers de blé, et que pour cette année présente Jean Fradesche l’avait affermée cinquante et cinq setiers de blé, et qu’il tenait son marché de m° Jean d’Aubusson, frère dudit Sr de la Borne ; et est ce que dit ledit déposant.
Et advenant lendemain, huitième jour desdits mois et an, nous commissaires susdits, dudit lieu et ville de Crocq, nous transportâmes au village de Herfeuille, distant l’un de l’autre de douze lieues ou environ, pour voir et visiter certaine chapelle étant audit village de Herfeuille en la paroisse de St Pardoux diocèse de Limoges, laquelle chapelle on dit être dépendant du prieuré de Blessac, de laquelle fîmes faire ouverture par Guillaume Perron, laboureur demeurant audit village de Herfeuille, ayant la garde des clefs et ornements d’icelle chapelle, comme après il nous dit sur ce enquis et par nous interrogé. Laquelle chapelle trouvâmes fort cassée, démolie et caduque en plusieurs et divers endroits d’icelle et en très mauvais ordre et réparation tant de couverture que de murailles, même n’y a aucune verrière ou vitre, ains est toute ouverte de tous côtés, par manière que le vent y peut entrer en tous temps. Au pignon d’icelle chapelle par le devant y avait deux fenêtres pour pendre deux cloches qui de tous temps ont accoutumé y être, comme on dit audit village et ès environs, en l’une desquelles fenêtres y avait pendu une cloche seulement, l’autre était dedans une fenêtre en ladite chapelle, qu’on nous dit pour lors naguère être tombée de l’autre desdites fenêtres, et était ladite cloche cassée. Dedans ladite chapelle avait plusieurs bancs et coffres avec une grande arche de bois servant de grenier à blé et plusieurs autres meubles et ustensiles de ménage, en manière que ladite chapelle ressemblait plus servir de grange que de oratoire. N’était aussi ladite chapelle pavée, ains toute jonchée et pleine de pailles, poudre, saleté et ordures. L’autel d’icelle était garni de deux nappes fort grosses, usées, pourries et pertuises en plusieurs endroits et rongées de rats et vermine, et si très noires, sales et ordes qu’il semblait qu’elles eussent servi plus de trois ans sans être reblanchies ni ôtées de dessus ledit autel. Sur lesdites nappes étaient deux corporaux tout déployés et découverts, lesquels autant ou plus sales que lesdites nappes, en sorte qu’on les eut estimé servit plutôt de torchons de cuisine que d’autre chose, et n’y a celui de quelque état qu’il soit qui se voulut servir de semblable linge en table ou autrement, parce que lesdites nappes et corporaux étaient tout pourris et puants. Trouvâmes aussi sur ledit autel un vaisseau de cuivre en forme de double potence, dedans lequel y avait trois petits paquets de quelques poudres et ossements brisés, pliés et enveloppés en [sendal] rouge , vieil et rompu, et ne sûmes dire que c’était parce que n’y avait aucun écriteau ; lesquels paquets étaient accoutumés être couverts de verre cristallin, duquel trouvâmes encore aucunes pièces dedans ledit vaisseau et mêlées avec lesdites poudres et paquets. Trouvâmes aussi sur ledit autel les ornements, comme aussi aube et chasuble, tout déchirés, rompus et sales, en tel désordre qu’il n’y avait celui auquel ils ne fissent horreur et qui ne craignit bien y toucher. Trouvâmes aussi en ladite chapelle un calice d’étain tout découvert et sans être enveloppé d’aucun linge, lequel était sur une pièce de bois près ledit autel, si sale et poudreux qu’on ne saurait penser. Joignant ladite chapelle, avait aucunes masures vieilles et apparences de logis et maisons où soulait être la demeurance du chapelain de ladite chapelle, comme lors nous fut dit et rapporté par aucuns des habitants dudit village, même par ledit Guillaume Perron, Pierre de Betz, Jehan Galicher et autres, lesquelles masures servent à présent de toit à vaches, brebis et pourceaux. Faite ladite visitation en présence desdits Pradal, Deschamps, Pasmole, Cholier, Tranchant, Genille et plusieurs autres.
Lesdits jour et an, et après ladite visitation faite, fut par nous ouï et interrogé ledit Guillaume Perron, âgé de quarante ans ou environ, laboureur demeurant au village de Herfeuille, paroisse dudit St Pardoux, lequel, après le serment par lui fait de dire et déposer vérité, nous dit qu’il avait la garde des clefs et ornements de ladite chapelle. Interrogé à qui était ladite chapelle, dit qu’elle était au prieur de Blessac, frère dudit seigneur de la Borne, et que ledit vicaire lui en faisait dix ou douze livres de ferme, et Jehan Fradesche était fermier de certaine dîme appartenant à ladite chapelle, et en faisait audit prieur pour cette année cinquante et cinq setiers de blé. Interrogé s’il avait jamais été audit lieu de Blessac et connaissait aucune des religieuses dudit lieu, dit que non, mais qu’elles avaient très mauvais bruit, et était comme renommée  que un chacun fréquentait avec elles et en leurs logis et maisons, aussi que allaient souventes fois jouer et à l’ébat sur les champs, et qu’on disait qu’elles avaient eu des enfants.
Ledit jour et an, Pierre de Betz, laboureur demeurant audit village de Herfeuille, âgé de trente et cinq ans ou environ, lequel après le serment par lui fait de dire et déposer vérité, interrogé s’il ne savait pas bien que la chapelle était dépendant dudit Blessac, dit que oui et que Jehan Fradesche était fermier de certaine dîmerie appartenant à ladite chapelle, à cinquante et cinq setiers de blé pour cette présente année, combien que aucunes fois en valait davantage. Interrogé s’il savait rien de l’état desdites religieuses et de leur manière de vivre, dit qu’il n’en savait rien sinon par le commun bruit qui était que le seigneur de la Borne entretenait la prieure dudit lieu et semblablement que les autres religieuses se gouvernaient mal.
Après laquelle visitation faite comme dit est, nous transportâmes au lieu et ville d’Aubusson, en la compagnie dudit Pradal, Deschamps et autres dessus nommés, en la maison où pend pour enseigne le Lion d’Or ; auquel lieu tantôt après que y fûmes arrivés, survinrent ledit Mr Jehan d’Aubusson, soi-disant prieur dudit Blessac, et Charles d’Aubusson son frère, baron de la Borne, tous deux accompagnés de plusieurs gentilshommes et mauvais garçons jusques au nombre de quarante ou cinquante, embâtonnés et ceints d’épées et poignards, en la présence desquels, dudit Pradal et plusieurs autres, ledit baron de la Borne, incontinent qu’il fut entré dans la chambre, comme tout ému et furieux, en lieu de salut, demanda si nous étions ceux qu’on disait être venus pour réformer les religieuses de Blessac, auquel fut répondu par ledit Pradal que oui, et incontinent ledit baron se prit à courroucer contre nous et à nous injurier en plusieurs et diverses manières, en disant que n’étions dignes et ne nous appartenait réformer de si honnêtes et nobles dames comme étaient les religieuses dudit lieu de Blessac, qu’elles vivaient mieux et plus honnêtement que nous, avaient meilleur bruit et moins besoin de réformation que nous, qu’elles étaient toutes gentilles femmes et de bonnes maisons, et ne appartenait à tels vilains et si méchants gens que nous entreprendre connaissance sur elles, et en jurant et blasphémant le nom de Dieu par plusieurs et diverses fois, que si procédions plus avant au fait de notre dite commission, il nous romprait les têtes, et que nous valait mieux jamais n’avoir entré en la Marche, et que serions beaucoup plus sûrement en notre abbaye, et par ce, que eussions à nous donner garde en rien nous enquérir de la vie et faits desdites religieuses, et qu’elles étaient trop femmes de bien, et plusieurs autres étranges, rigoureuses et outrageuses paroles. Semblablement usait envers nous de tels ou semblables propos et menaces ledit m° Jehan d’Aubusson, frère dudit baron, soi-disant prieur dudit Blessac, et plusieurs autres de leur compagnie, en disant que ne serions sages aller voir et visiter ledit prieuré dudit Blessac, comme mandé nous était.
Et advenant le lendemain, neuvième jour dudit mois, audit lieu d’Aubusson et logis, et environ dix heures du matin, retournèrent ledit m° Jehan d’Aubusson, accompagné comme dessus, lequel d’Aubusson et sondit frère baron réitérèrent à l’encontre de nous tels ou plus étranges propos, menaces et paroles injurieuses qu’ils avaient fait le jour précédent, à quoi, ce nonobstant, par nous ni aucun de nous nulle desdites fois, avant ni depuis, ne fut faite aucune réplique ni dit un seul mot.
Tantôt après furent appelées par devant ledit Pradal noble et religieuse dame, madame Renée de Bourbon, abbesse du monastère et ordre dudit Fontevrault, demanderesse en exécution d’arrêt sur la réformation dudit prieuré de Blessac contre ledit m° Jehan d’Aubusson et frère Antoine Le Gent, eux-disant prieurs dudit Blessac, défendeurs en ladite exécution d’arrêt, savoir est notre dite dame par ledit Deschamps, ledit d’Aubusson en personne, et ledit Le Gent par m° Pierre Tranchant. Ledit Deschamps pour notre dite dame présenta audit Pradal certain arrêt de la réformation dudit prieuré de Blesssac en date du vingt et sixième jour d’avril l’an mil cinq cent trente (26 avril 1530), requérant ledit Deschamps l’exécution dudit arrêt audit Pradal, commissaire en cette tenue, plus à plein en notre dite commission, et que à ce ledit d’Aubusson, Le Gent et autres fussent contraints y obéir par les coertions dudit arrêt et toutes autres manières dues et raisonnables, avec condamnation de dépens, dommages et intérêts, à quoi par ledit Tranchant, procureur quant à ce spécialement fondé pour ledit Le Gent fut dit qu’il y consentait les fins et conclusions prises par ledit Deschamps, et que de sa part il ne entendait ni voulait empêcher l’exécution dudit arrêt en tout et partout selon sa forme et teneur. Par quoi, du consentement dudit Le gent, par ledit Pradal fut déclaré exécutoire quant à lui. Et au regard dudit d’Aubusson, parlant par la voix de maître Jehan Brunet, licencié ès lois, fut dit que aussi ne voulait et n’entendait empêcher de sa part l’exécution dudit arrêt ; demanda nonobstant terme de venir répondre auxdites conclusions, qui lui fut baillé jusques à trois heures après midi dudit jour. Laquelle heure advenue, comparurent par devant Pradal ledit d’Aubusson accompagné de sondit frère et plusieurs autres gentilshommes en grand nombre, comme dessus, et ledit Deschamps pour notre dite dame qui requit que ledit d’Aubusson eut à défendre à sesdites conclusions en suivant l’appointement dudit Pradal. A quoi par icelui d’Aubusson, parlant comme dessus, fut dit que ledit Pradal ne pouvait ni devait assister avec nous à la visitation et réformation dudit prieuré, et que n’étions capables, idoines ni suffisants pour certaines telles quelles causes de récusation baillées par écrit par ledit d’Aubusson qui lors furent lues à haute voix. Nonobstant lesquelles fut remontré au contraire par ledit Deschamps qui a persisté à sesdites conclusions. Et alors sans attendre l’ordonnance et appointement dudit Pradal, ledit Sr de la Borne qui était assis près ledit Pradal, semblablement ledit m° Jehan d’Aubuson, frères, se levèrent soudainement en murmurant et eux courrouçant, tant contre ledit Pradal, Deschamps, que contre nous, en disant que « par le sang-Dieu nous n’y entrerions point, ni aussi ledit Pradal, audit prieuré, et que si nous essayions de ce faire , nous trouverions bien carrière, et qu’ils allaient devant nous apprêter le logis et banquet », et en tenant ces propos et plusieurs autres fort fâcheux, rigoureux et violents, issèrent hors de ladite chambre lesdits d’Aubusson et emmenèrent avec eux tous lesdits gentilshommes et autres qu’ils avaient amenés, le tout en très gros bruit, scandale et désobéissance de justice. Ce néanmoins ledit Pradal envoya quérir ledit m° Jehan d’Aubusson, en la présence duquel et de sondit conseil, il déclara que, nonobstant et sans avoir regard ès dites causes de récusation contre nous baillées, il passerait outre et assisterait avec nous à ladite réformation, et pour ce donna assignation au lendemain, dixième jour dudit mois de juillet, audit prieuré de Blessac, heure de sept heures attendant huit du matin. Duquel appointement ledit d’Aubusson se porta pour appelant. En quoi faisant il s‘en va derechef tout courroucé et mutiné ou menaçant et blasphémant comme dessus. Lesquelles menaces, joint le commun bruit que lesdits d’Aubusson et chacun d’eux ont audit lieu d’Aubusson et ailleurs de battre, frapper et tuer indifféremment, sans propos et ordinairement user de force et violence, donnèrent quelque crainte audit Pradal et à nous de aller audit prieuré pour exécuter ledit arrêt et commission. Aussi qu’il nous fut rapporté par ledit m° Jehan Brunet, Léonard Martellade, m° Antoine d’Aubusson, prévôt du Moutier-Rozeille, et plusieurs autres de la ville d’Aubusson, que au dedans dudit lieu de Blessac y avait plusieurs des parents desdites religieuses et autres tenant fort audit prieuré, et garnis de bâtons, hacquebutes, arbalètes et autres bâtons [invasibles], pour nous empêcher l’entrée audit prieuré, disant que ne serions sages y aller sans main-forte, et qu’ils étaient assurés qu’il se ferait meurtre et grosse batterie. Par quoi ledit Pradal fit commandement audit Brunet, Martellade et m° Antoine d’Aubusson, prévôt susdit, de par le Roi et à la peine de cinq cent livres audit Sr à appliquer, de venir ledit lendemain, dite heure de sept attendant huit, accompagner nous et ledit Pradal pour aller audit prieuré, afin que en leur compagnie fussions en plus grande sûreté de nos personnes. Lesquels et chacun d’eux firent réponses que « pour rien au monde ils ne le feraient, non pas pour dix mille écus qui les leur baillerait, mais que en toute autre part où il plairait audit Pradal les mener lui obéiraient et accompagneraient très volontiers, mais non audit lieu de Blessac, parce qu’ils savaient bien que eux-mêmes y seraient en grand danger, nonobstant qu’ils fussent connus, parents, officiers et amis desdits d’Aubusson, et qu’ils savaient bien que lesdits d’Aubusson savaient faire, et de quelle fureur, force et violence ont accoutumé user, et même qu’ils étaient si très marris, sans raison et quasi insensés pour cause dudit arrêt de réformation, voyant que par le moyen d’icelle ils étaient en danger de perdre la possession du prieuré de Blessac, duquel ils avaient joui entre eux et leurs prédécesseurs par si long espace de temps sans contredit ou empêchement aucun ». Nonobstant lesquelles remontrances et excuses, fit derechef ledit Pradal commandement, à la peine du double, aux dessus dits Brunet, Martellade et prévôt du Moutier-Rozeille, venir accompagner nous et ledit Pradal audit leu de Blessac, et pour se faire se tenir prêts à ladite heure de sept dudit lendemain en notre dit logis du Lion d’Or, pour d’illec se transporter sur les lieux, lesquels furent de ce faire refusant, par les moyens et excuses que dessus.
Attendant ladite heure de sept heures dudit lendemain, ledit neuvième jour dudit mois, audit lieu d’Aubusson, furent par nous ouï sur lesdits articles les trois témoins ensuivants :
Et premièrement
Maître Antoine Leclerc, à présent demeurant en la ville de Crocq, âgé de vingt et deux ans ou environ, lequel après le serment par lui fait de dire et déposer vérité, fut par nous interrogé s’il connaissait lesdites religieuses dudit lieu de Blessac, lequel déposant dit que non, parce qu’il était tenu aux écoles à Poitiers et ailleurs, et ne s’était tenu sur le lieu ; mais depuis qu’il était au pays en avait ouï parler fort sinistrement et déshonnêtement, et qu’il était commun bruit audit lieu de Crocq que lesdites religieuses vivaient fort lubriquement et que le baron de la Borne avait laissé sa femme pour entretenir la prieure dudit lieu. Interrogé s’il savait aucune chose du revenu dudit prieuré, dit que non, fors de une chapelle près ladite ville de Crocq, dépendant dudit prieuré, laquelle il dit valoir commune année soixante setiers de blé et dix ou douze livres tournois en argent, comme il déposant a ouï dire au fermier d’icelle chapelle et plusieurs autres. Dit aussi ledit déposant sur ce interrogé, que ladite chapelle était en fort grande ruine et décadence et fort mal entretenue, en sorte que la dévotion du peuple était fort diminuée. Dit aussi ledit déposant que au moyen desdites ruine et décadence et par faute de verrières, était advenu un très grand scandale puis n’y a guère en ladite chapelle, qui est que en y célébrant la messe vint un vent qui emporta la sainte hostie de dessus l’autel jusques au milieu de ladite chapelle, comme aussi ledit déposant dit avoir ouï dire à aucuns de ladite ville de Crocq.
Maître Jehan de Lyon, prêtre, protonotaire et chanoine de St Gacien de Tours, âgé de vingt et cinq ans ou environ, demeurant au lieu de Passat près Montluçon, après le serment par lui fait, dit que le jour de St Jehan Baptiste dernier passé, vit une des religieuses de Blessac toute seule, de laquelle ne sut dire le nom, à St Jean de Villiers en Bourbonnais, qui est, comme il est dit, une chapelle dépendant dudit prieuré de Blessac, laquelle religieuse il déposant dit être encore pour le présent et toujours depuis et longtemps devant y avoir demeuré.
Maître Austrille de la Soumaigne, protonotaire du St Siège apostolique et curé de Saint Marc, âgé de vingt et deux ans ou environ, après le serment par lui fait, dit, sur ce enquis, qu’il connaissait les religieuses dudit lieu de Blessac, et que plusieurs d’icelles étaient ses cousines et proches parentes. Dit aussi avoir plusieurs fois été audit lieu de Blessac, parce que leur maison d’Aubepeyre où il se tient n’est loin dudit Blessac que de deux lieues ou environ. Dit aussi sur ce enquis, que la prieure dudit lieu portait souventes fois une cote de […] blanc et des mouchoirs de satin blanc, frangés et ouvrés et attachés par le dessous à lacs et gros boutons de soie, la chemise soufflée par le dessous en la manière des plus mondaines qu’on saurait voir. Portait aussi ladite prieure en ses doigts plusieurs bagues et anneaux, comme tout ce il qui dépose dit avoir ouï dire à une femme nommée Marguerite de Pontcharrault ; laquelle il dit lui avoir dit souventes fois avoir vu ladite prieure en l’état que dessus. Dit aussi ledit déposant que, aujourd’hui a quinze jours, son frère aîné, nommé Lionnet de la Soumaigne, seigneur dudit lieu d’Aubepeyre, en venant du Râteau en la Marche, qui est une place à lui appartenant, passa et fut en la commanderie de Chambereau distante dudit Blessac de deux lieues ou environ, auquel lieu il trouva avec le commandeur dudit lieu trois des religieuses dudit Blessac, l’une desquelles se appelle Marguerite d’Aubusson, autrement de la Feuillade, et des autres ne sait le nom, comme ce il déposant dit savoir par le rapport que lui en fit son frère tantôt après qu’il fut arrivé en sadite maison d’Aubepeyre. Dit aussi, sur ce interrogé ledit déposant, que le bruit est tout commun que Charles d’Aubusson, seigneur de la Borne, entretient la prieure dudit Blessac, et qu’il fréquente avec elle comme si elle était sa femme et ne bouge ordinairement dudit prieuré, parce que dudit lieu où il se tient jusques audit lieu de Blkesac n’y a de distance que de douze lieues ou environ ; outre qu’il a tant fréquenté avec ladite prieure que c’est une voix commune qu ‘elle a eu de lui trois ou quatre enfants et que non seulement ladite prieure a bruit de mal se gouverner, mais aussi plusieurs et la plus grande part desdites religieuses sont notées de incontinence et lubricité et ont eu aussi des enfants. Dit outre ledit déposant que pour l’amour de ses parentes qui sont religieuses audit lieu, il et sondit frère voudraient qu’il leur eut coûté beaucoup de leur bien et ledit prieuré fut bien réformé.
Et advenant le lendemain et dite heure de sept heures de matin qui était l’assignation pour nous transporter avec ledit Pradal audit prieuré, et voyant icelui Pradal que lesdits Brunet, Martellade et d’Aubusson, prévôt, n’étaient venus, comme enjoint leur avait été, pour accompagner nous et ledit Pradal, icelui Pradal, ce requérant ledit Deschamps , envoya derechef faire lesdits commandements auxdits Brunet et Martellade qui étaient demeurant en ladite ville d’Aubusson, par Gabriel Cholier, sergent royal, qui rapporta, quant audit Brunet qu’il ne l’avait su trouver à son logis, ni savoir ailleurs où il était, et quant audit Martellade, qu’il avait encore trouvé couché au lit, malade, comme il lui dit, de la colique, nonobstant qu’il fut tantôt après vu dehors sain et en bon point. Par quoi, attendu lesdites désobéissances faites au Roi et à justice par lesdits Brunet, Martellade et prévôt, ledit Deschamps, procureur susdit, requit contre eux et chacun d’eux défaut, et que par vertu d’icelui ledit Pradal, commissaire susdit, eut à déclarer les peines avoir été par eux encourues, ce que ne voulut faire pour lors, ains lui réserva faire droit sur ce en fin d’exécution.
Et bientôt survinrent audit logis Louis de St Julien, écuyer, seigneur d’Escurettes, et ledit m° Jehan d’Aubusson, avec deux ou trois gentilshommes et cinq ou six serviteurs, lesquels de St Julien et d’Aubusson nous dirent, semblablement audit Pradal, que très volontiers que nous, commissaires susdits, sans ledit Pradal, allissions audit prieuré, et nous permettraient entrer dans icelui, le voir et visiter, parler auxdites religieuses, nous informer et enquérir selon que par notre commission mandé nous était, et que en ce faisant ne nous feraient ni feraient faire aucun déplaisir, mais jurèrent et détestèrent le nom de Dieu que ledit Pradal ne irait point avec nous, ni nous avec lui. Par quoi nous, voyant la crainte dudit Pradal, lequel semblablement nous conseillait y aller tous deux tous seuls, et que vu lesdites menaces et rebellions, ne serions jamais obéis en sa compagnie, ains en plus grand danger de nos personnes, et que s’il allait avec nous y aurait de la folie, attendu aussi que nous, ni ledit Pradal, ne sûmes trouver aucun qu’il nous voulut accompagner sur ledit prieuré, quelques injonctions et commandements pénaux qui leur fussent faits, comme dit est, voyant aussi que lesdits d’Aubusson ne tendaient que rendre ledit arrêt illusoire et suspendre l’exécution d’icelui, pour ces causes et autres, condescendîmes et nous accordâmes aller tous deux tous seuls audit prieuré avec lesdits de St Julien, d’Aubusson et autres, avec lesquels environ l’heure de huit heures dudit lendemain, dixième jour dudit mois de juillet, dudit lieu d’Aubusson nous transportâmes audit prieuré de Blessac, distants l’un de l’autre douze lieues ou environ, pour commencer à vaquer au fait de notre commission.
Et premièrement entrâmes dedans l’église desdites religieuses, et après avoir salué et fait oraison en icelle devant le corps Notre Seigneur, visitâmes le grand autel que trouvâmes garni de tris nappes, et les corporaux dessus tous dépliés, avec les ornements, savoir est chasuble, aube et […], le tout fort sale et déshonnête et mal en ordre, le sacre pendant sur ledit autel à une petite corde déliée et nouée en plusieurs endroits, en grand danger de rompre en bref, comme est vraisemblable que plusieurs fois a été rompue, pour la présomption desdits nœuds ; la custode en laquelle pendait le ciboire dudit sacre était de linge par trop sale. Laquelle église trouvâmes toute pleine de paille, poudre et ordure. Et de là nous transportâmes au cœur desdites religieuses, lesquelles y trouvâmes assemblées, savoir est : sœurs Françoise d’Aubusson, prieure, Jehanne de Rebéré, prieure de cloître, Marguerite de St Domain, célérière, Louise de St George, sous-prieure, Jehanne de St George, secrétaire, Marguerite d’Aubusson, infirmière, Dauphine du Tou, Jacquette de St Julien, Jehane de Ussé, Jehanne de St George. Après demandâmes à ladite prieure si c’étaient toutes les religieuses dudit prieuré, qui nous fit réponse qu’il y en avait encore une, nommée Gabrielle de Parsac, qui était absente y avait six semaines ou plus, par son congé et licence, comme elle nous dit, et plusieurs autres desdites religieuses. Et la raison pour quoi elle était absente dudit monastère et prieuré était, comme ladite prieure et autres nous dirent, parce qu’elle n’avait que manger et qu’elle était contrainte en aller demander chez ses parents et amis, et non seulement elle, mais aussi plusieurs des autres religieuses dudit lieu étaient contraintes de ce faire. Et quand nous remontrâmes à ladite prieure que cela ne se devait faire, et qu’elle, en leur donnant de tels congés, les exposait en danger de apostates et être méchantes, comme le commun bruit est qu’elles sont, laquelle prieure nous fit réponse que le prieur ne leur voulait rien donner outre ce qu’il avait accoutumé, nonobstant que le temps soit beaucoup plus cher qu’il n’était. Et lors enquîmes ladite prieure combien elle et chacune des autres desdites religieuses avaient accoutumé avoir dudit prieur, ce que ne nous voulut dire, mais seulement que ledit prieur leur donnait si peu de chose que ce n’était pour suffire au vivre et entretènement de la quarte partie desdites religieuses, par quoi étaient contraintes courir et vagabonder, comme dit est, laquelle chose nous fut dite et confirmée par plusieurs des autres desdites religieuses dudit lieu sur ce enquises et interrogées. Trouvâmes aussi ladite église très mal garnie et pourvue des livres nécessaires pour faire le service divin selon l’ordre et fondation d’icelle, même n’y avait livres de chant qui pussent servir à dire ou faire ledit service à haute voix et chanté, comme se doit et a accoutumé être fait ès autres couvents dudit ordre, étant non réformés. Ains ceux qui y étaient étaient presque tous décousus, déchirés et rompus, si vieils et antiques que n’y a mot entier et ne serait possible y lire ni chanter. Lors demandâmes auxdites religieuses comment et en quelle sorte elles disaient ledit service divin, lesquelles nous firent réponse qu’elles le disaient en basse voix et non chanté.
Et d’illec nous transportâmes en la chambre de ladite prieure, pour ce que c’était le lieu plus apparent pour faire notre examen, en une part de laquelle chambre nous retirâmes ladite prieure, les autres religieuses d’autre part retirées qu’elles nous pouvaient voir, selon les statuts et forme de visitation. Laquelle prieure nous interrogeâmes comment elles faisaient et disaient ledit service, en continuant le propos encommencé, laquelle nous fit réponse qu’elles disaient matines environ quatre ou cinq heures du matin, pour ce qu’il n’y avait nulle horloge, et puis faisaient quelque intervalle, et tantôt après retournaient dire le surplus jusques à vêpres. Interrogée ladite prieure du revenu dudit prieuré, dit qu’il valait pour le moins mille livres tournois, dit aussi, sur ce enquise, où étaient les lettres, titres et enseignements dudit revenu, qu’ils étaient en un coffre de ladite église duquel elle avait la clef, fors celle de la fondation et première institution dudit prieuré, que ledit Sr de la Borne tient de longtemps en sa possession et duquel ne l’ont pu et ne peuvent retirer, en quelque sorte et manière que ce soit. Et derechef lui demandâmes combien elle et les autres religieuses avaient dudit revenu pour leur portion, mais en disant ces paroles, lesdits m° Jean d’Aubusson et seigneur d’Escurettes et plusieurs autres parents desdites religieuses, avec leurs complices et alliés, lesquels avaient tous les épées et poignards aux côtés et nous surveillaient quelque part que nous allissions, nous dirent, qu’en que soit ledit d’Aubusson : « Sus, sus, Messieurs. Par le sang-Dieu, c’est assez jasé. Allons ! allons ! » Par quoi ladite prieure lors ne nous fit aucune réponse. Par quoi fûmes contraints pour lors nous départir desdites religieuses, et nous transportâmes au lieu de St Jehan de l’Habit, qui est le lieu député pour l’habitation des frères nécessaires pour administrer les sacrements et autres choses nécessaires auxdites religieuses, auquel lieu demeure à présent ledit d’Aubusson et y fait sa continuelle résidence.
Auquel lieu trouvâmes vingt ou vingt cinq personnes, tant gentilshommes que autres méchants garnements tous embâtonnés d’épées et poignards, desquels les chausses, pourpoints et autres habillements étaient découpés et déchiquetés en manière d’aventuriers. Aussi trouvâmes audit lieu de l’Habit plusieurs arbalètes, hacquebutes, couleuvrines, cornets à poudre de canon et autres bâtons à feu et invasibles, grand nombre de chiens et oiseaux de proie, en sorte que tout ledit logis en était infect et puant. Auquel dinâmes en la compagnie desdits d’Aubusson, d’Escurettes et autres, les propos desquels durant dîner ne furent que de paillardise et méchanceté, sans cesser de jurer et blasphémer le nom de Dieu en plusieurs sortes et manières ; durant lequel dîner et tout le temps que fîmes audit lieu de Blessac, avait ledit d’Aubusson attaché à son bonnet rond un bouquet d’œillets lié de cheveux de l’une desdites religieuses qui lui avait été baillé en notre présence en l’église, devant dîner, durant que nous y étions. Et un semblable avait ledit d’Aubusson quand il vint pour nous quérir en ladite ville d’Aubusson , lequel bouquet il oublia et laissa sur la table de la chambre de notre dit logis. Dit aussi ledit d’Aubusson en dînant qu’il était marri  qu’il n’avait amené aucune desdites religieuses pour lui tenir compagnie à dîner, et de fait en envoya quérir une, qui lui fit réponse par le messager qu’elle avait jà commencé et était à table. Et lors demandâmes audit d’Aubusson si aucunes fois en venait pour dîner avec lui, qui nous fit réponse que oui, souvent. Durant lequel dîner ledit d’Aubusson nous fit enfermer de clef au dedans ledit logis de l’Habit, par quoi fumes alors en plus grande crainte de nos personnes ; au moyen de quoi ne nous fut loisible et craignîmes lors faire plus ample inquisition et visitation, comme eussions bien voulu et pu sans la crainte des dessus dits qui nous suivaient toujours de près et nous assaillaient de plusieurs propos fâcheux et ne demandaient sinon que nous donnissions occasion de se mutiner, mêmement ledit m° Jehan d’Aubusson.
Après dîner fûmes derechef pour parfaire et achever notre dite visitation et inquisition au logis desdites religieuses. Et premièrement nous transportâmes en la chambre de sœur Jehanne de Rebéré, prieure de cloître dudit lieu, toujours accompagnés dudit m° Jehan d’Aubusson, sesdits complices et méchants garnements comme dessus, et embâtonnés comme dit est. En laquelle chambre trouvâmes trois ou quatre demoiselles, comme nous dit ladite prieure de cloître, avec leur train de chambrières et valets, et incontinent que fûmes entrés en ladite chambre et ledit d’Aubusson eût aperçu lesdites demoiselles, en notre présence, aussi desdites prieure, sous-prieure et toutes les autres religieuses dudit lieu, lesquelles étaient venues et entrées avec nous, ledit d’Aubusson, soi-disant prieur, les baisa toutes l’une après l’autre, l’une desquelles demoiselles il prit entre ses bras, l’embrassa, et la renversant sur le dos sur le lit de ladite chambre, la retint sous lui un long espace de temps, la baisant toujours et lui mettant la main aux seins et lui faisant plusieurs autres actes et attouchements sales, déshonnêtes et impudiques. Quoi voyant lesdites religieuses, chacun en en son endroit se prit à sourire envers ledit d’Aubusson en lui jetant plusieurs regard dissolus et impudiques, comme si elles eussent pris plaisir à ce que ledit d’Aubusson faisait avec ladite demoiselle. Item nous primes et retirâmes à part en un coin de ladite chambre ladite prieure de cloître, laquelle interrogeâmes de la forme de vivre audit lieu, mêmement sur le gouvernement de ladite prieure, laquelle nous dit que icelle prieure se gouvernait très mal, en grande dissolution, lubricité et scandale de toute la religion et ordre ; qu’elle admettait ordinairement et indifféremment au dedans dudit prieuré et particulièrement en sa chambre plusieurs gentilshommes et autres mal renommés et notés d’incontinence, sans dénier l’entrée à aucun, lesquels gentilshommes et autres y demeuraient longuement et n’en bougeaient ni jour ni nuit, et plus que nul autre le seigneur de la Borne et sondit frère, nous priant ladite prieure de cloître que de ce voulissions corriger ladite prieure, ce que n’avons osé faire pour la crainte que avions dudit m° Jean d’Aubusson et de sa bande qui toujours nous suivait en soie de velours, l’épée au coté et le bouquet sur l’oreille, ni osâmes aussi faire la correction en présence dudit m° Jehan d’Aubusson par autant que le commun bruit est audit lieu de Blessac, en la ville d‘Aubusson et ailleurs ès environs que icelui m° Jehan d’Aubusson, pareillement son frère, le seigneur de la Borne, entretenaient tous deux ladite prieure. Pareillement nous dit ladite prieure de cloître que ladite prieure allait souvent jouer dehors chez les gentilshommes voisins et autres, et le plus souvent chez le seigneur de la Borne et sondit frère, au château de la Borne et audit lieu de l’Habit.
Après tirâmes et parlâmes à part en ladite chambre à sœur Marguerite de St Domain, célérière dudit lieu, et après à plusieurs particulièrement des autres religieuses, chacune desqelles se plaignait fort dudit m° Jehan d’Aubusson et de ladite prieure et de leur méchant gouvernement, en disant que ledit d’Aubusson les laissait presque mourir de faim et ne leur donnait comme rien pour vivre et se entretenir, au moyen de quoi étaient contraintes la plupart du temps aller vivre chez leurs parents. Nous dirent aussi plusieurs desdites religieuses, avec ladite prieure de cloître, que ladite prieure était fort sujette à ses complexions et plaisirs mondains, et qu’elle portait ordinairement habillements trop dissolus et exquis et qui plus appartenaient et convenaient à dames, demoiselles et autres femmes séculières que à religieuses, comme anneaux en grand nombre, patenôtres trop précieuses et curieuses, cotes de satin et […], robes de serge et demi-ostade, manchons de satin et de velours de couleur blanche et autre, fendues par dessous et soufflées de la chemise, à la mode qui a cours aujourd’hui au monde, rubans colorés en ceinture, souliers escolletés et plusieurs superfluités mondaines. Et de fait ledit jour vîmes ladite prieure ayant vêtu une cote de […] blanc, la queue traînant en façon de demoiselle et bordée par le dessous de noir ; avait aussi ladite prieure par dessus ladite cote une robe de drap noir doublée de demi-ostade, comme aperçûmes parce que ladite robe était troussée par le dessous, tout autour, à la mode des séculières ; avait aussi ladite prieure des souliers escolletés, larges et cornus par le devant, en la manière que à présent les portent les séculiers. De laquelle façon et mode de souliers portaient aussi toutes les jeunes religieuses dudit lieu, à aucunes desquelles vîmes des anneaux en leurs doigts, mêmement auxdites Jeanne de St george, de Rebéré et Marguerite d’Aubusson, autrement appelée de la Feuillade. Les voiles et accoutrements de la tête desdites religieuses étaient de toile fort déliée, mais petits et hautement et curieusement accoutrés, et tous les autres habillements et accoutrements de leurs personnes, en sorte que un chacun à les voir ne les jugerait être religieuses, ains plutôt demoiselles et séculières. Trouvâmes pareillement toutes lesdites religieuses vêtues de cotes blanches, aucunes desquelles étaient bordées de noir, et aucunes desdites religieuses avaient robes doublées de demi-ostade et trouées comme celle de ladite prieure. Et nous fut dit lors par aucun de la compagnie dudit d’Aubusson, dont ne sûmes savoir le nom, que les habillements que lors portaient lesdites religieuses n’étaient que les habillements des jours ouvriers, et que les fêtes en portaient bien d’autres plus riches, somptueux et glorieux.
De la chambre de ladite prieure de cloître nous transportâmes en la chambre de sœur Marguerite de Saint Domain, célérière, en la compagnie de toutes lesdites religieuses, et nous suivaient toujours de près ledit d’Aubusson et sa bande. Laquelle chambre trouvâmes en un fort pauvre et piteux ordre : n’était pavée ni couverte, en sorte qu’il y pleuvait en tous endroits, dont se complaignait fort à nous ladite de St Domain, disant qu’elle n’y pouvait plus demeurer, et par ce que eussions à y mettre ordre et y pourvoir. Enquise la dite prieure et autres qui les confessait, disait leurs messes et leur administrait les sacrements de l’église, répondirent que c’était un prêtre, lequel fîmes venir par devers nous, qui était de l’âge de quatre vingt dix ans ou environ, tout cassé et décrépi et si vieux qu’il ne voit quasi plus et n’est possible qu’il se puisse bien acquitter de ladite charge.
Ces choses faites, nous fîmes conduire par lesdits religieuses au lieu où soulait être le cloître, où trouvâmes seulement l’apparence du circuit et fondements d’icelui, fors qu’il y avait encore aucuns piliers debout et un côté garni de vieille charpente, tout découvert, par faute de laquelle couverture ladite charpente était pourrie et gâtée. N’y avait aussi dortoir, réfectoire, chapitre ni autres officines requises à observance régulière, fors seulement de vieilles masures èsquelles ont lesdites religieuses à présent leur demeurance, séparées loin l’une de l’autre, lesquelles vivent et couchent pareillement à part et non en commun. Ont chacune chambrière et filles et enfants qu’elles disent avoir pris et tenir avec elles pour les instruire et apprendre.
Et comme voulions plus avant enquérir et visiter, fumes empêchés par ledit m° jean d’Aubusson et sadite bande qui toujours nous suivait quelque part que nous allissions et ne permettait nous laisser voir et enquérir librement, en disant : « Sus, sus. Allons ! Par le sang-Dieu, il est temps de s’en aller. C’est trop fait pour mesuy. » Et jurait, tant ledit d’Aubusson que les autres de sadite compagnie, en plusieurs et diverses sortes, et disait plusieurs paroles fâcheuses par lesquelles il ne demandait que soi mutiner et occasion de soi courroucer contre nous. Par quoi, craignant avoir déplaisir, fûmes contraints nous départir dudit lieu de Blessac et nous en retournâmes ledit jour audit lieu d’Aubusson.
Auquel lieu, et le lendemain onzième jour du mois, enquîmes Damien Parade, serrurier demeurant en ladite ville d’Aubusson, âgé de vingt et cinq ans ou environ, s’il savait aucune chose de la vie et gouvernement desdites religieuses, dit que lui demeurant à Castanault en Rouergue, aucuns des habitants dudit lieu lui demandèrent si lesdites religieuses vivaient si mal et lascivement qu’il en était bruit. Dit aussi que du temps qu’il a demeuré audit lieu de la Borne, a vu plusieurs fois lesdites prieure et religieuses aller et venir souvent audit lieu de la Borne, y dîner, souper, boire et manger et banqueter. Et quand voulûmes faire faire le serment en tel cas accoutumé audit Parade et sadite déposition rédiger par écrit, ne voulut faire aucun serment, disant qu’il s’en repentait beaucoup de ce qu’il nous en avait dit, parce que si ledit Sr de la Borne et sondit frère le savaient, il serait contraint de vider le pays, ou le tueraient. Semblablement voulûmes informer, et de fait parlâmes à plusieurs personnes dudit lieu d’Aubusson, nous encore y étant, touchant l’état desdits religieuses et des abus et malversations qu’on dit qu’elles commettent, mais n’en trouvâmes aucun qui en voulut déposer sur le lieu, ni semblablement en ladite ville d’Aubusson, ni ès environ près desdits baron et son frère, ains disaient que s’ils en avaient parlé tant peu fut-il, que ledit baron et sondit frère les viendraient ou enverraient tuer jusques au lit ; mais bien nous disaient que c’était la plus grande pitié qu’on saurait dire ni penser et qu’il gagnerait paradis, qui les réformerait.
A cette cause nous a été force informer et enquérir au plus loin. Par quoi, ledit onzième jour dudit mois, nous en retournâmes de ladite ville d’ Aubusson en la compagnie dudit Pradal et plusieurs autres dessus nommés, auquel jour et mois, étant audit lieu de Crocq, fut par nous ouï Marsault Marcy, laboureur demeurant au village de Cruchaut paroisse de [Seau] âgé de soixante et dix ans ou environ, lequel , après le serment par lui fait de dire et déposer vérité, dit qu’il  bonne connaissance de m° Jehan d’Aubusson depuis le temps de sa jeunesse, auquel il a vu user assez mauvaise et dissolue vie, et lui a vu quasi toujours porter l’épée au côté, plumes et bouquets en son bonnet, comme si c’eût été un homme pur séculier. Dit aussi qu’il a vu ledit m° Jehan d’Aubusson user et que encore à présent use de forces et violences, et que plusieurs filles ont été forcées et violées par lui. Dit pareillement que puis trois ou quatre mois en ça, autrement du temps n’est recors, il déposant étant au château de la Borne, vit ledit maître Jehan d’Aubusson prendre une jeune fille à marier, âgée de vingt ans ou environ, devant ledit château, laquelle il déposant dit que la prit et emmena par force, par ce ladite fille se défendait de lui et criait tant qu’elle pouvait. Dit aussi icelui déposant que ainsi que ledit d’Aubusson emmenait ladite fille, lui dit « Monsieur, vous ne cherchez et ne demandez que les belles filles ! » auquel déposant ledit d’Aubusson ne fit aucune réponse, et depuis ne vit ladite fille. Dit aussi il déposant sur ce enquis que ledit m° Jehan d’Aubusson a souventes fois mené et tenu plusieurs gens de guerre et mauvais garçons en grand nombre audit prieuré, qui ont pris et emporté tous les fruits et revenu d’icelui. Dit aussi sur ce enquis qu’il a plusieurs fois vu Charles d’Aubusson, baron de la Borne et frère dudit m° Jehan d’Aubusson, aller, venir et fréquenter audit prieuré. Pareillement a vu la prieure et plusieurs autres religieuses dudit lieu boire, manger, banqueter et coucher au château dudit lieu de la Borne, et ladite prieure plus souvent que nulle autre desdites religieuses, laquelle prieure ledit déposant dit avoir vu souventes fois baiser et embrasser audit baron de la Borne. Et outre, qu’il est un commun bruit qu’il en a eu plusieurs enfants, aucuns desquels ont été nourris audit château de la Borne, et que pour entretenir ladite prieure ledit baron a laissé sa femme et abandonnée, laquelle pour cette cause il dit avoir été retirée et à présent demeurer avec sa mère. A aussi ouï dire, comme il déposant dit, que la plupart desdites religieuses mènent vie lubrique et très méchante, et que toutes manières de gens hantent, fréquentent avec elles, par manière que tout le pays en est infect et scandalisé.
Le douzième jour du mois de juillet, nous étant an ladite ville de Crocq, fut par nous ouï Jacques Fradachon, laboureur demeurant au village de Herfeuille, âgé de trente et cinq ans ou environ, lequel après le serment par lui fait, dit qu’il a plusieurs fois ouï dire audit lieu de Herfeuille, en ladite ville de Crocq et ailleurs, que la prieure de Blessac et trois autres des religieuses dudit lieu ont eu des enfants, lesquelles autrement ne a su nommer, ni dire le nombre desdits enfants. Dit aussi ledit déposant sur ce interrogé qu’il a plusieurs fois vu lesdites religieuses, que soit plusieurs d’icelles, dehors ledit prieuré et aller ensemble à l’ébat en plusieurs lieux circonvoisins.
Ledit jour, au lieu de Pontgibault, interrogé messire Gabriel Regnault , prêtre vicaire dudit lieu, âgé de quarante ans ou environ, dit après le serment par lui fait que a ouï dire à plusieurs marchands de Felletin, d’Aubusson et autres voisins dudit lieu de Blessac, comme il y allaient et venaient au marché dudit lieu de Montferrand, que lesdites religieuses mènent une très méchante et abominable vie, que la prieure et autres religieuses dudit lieu étaient entretenues par le baron de la Borne et son frère, soi-disant prieur dudit lieu, et que d’iceux elles avaient eu des enfants, et que selon que lui ont dit lesdits marchands, c’est pitié du désordre et méchant gouvernement que est audit prieuré, tant envers le service divin que autrement, et que tout le monde se émerveille fort comme ceux qui en avaient le gouvernement n’y donnaient quelque ordre. Dit aussi que ledit baron et sondit frère ont bruit d’être fort violents, user de force, frapper et battre un chacun à tort et sans raison, par manière que par les grands excès qu’ils commettent chacun jour au pays ils sont craints de tous et n’y a celui qui osât rien dire ni déposer contre eux.
Le treizième jour dudit mois, et nous en retournant dudit Pontgibault audit lieu de Montferrand, trouvâmes sur les chemins m° Antoine Tarde, greffier dudit lieu de Pontgibault, natif de la Roche d’Anjoux en Auvergne, âgé de trente ans ou environ , aveC lequel chevauchâmes jusques au lieu de Montferrand, et en chevauchant nous dit, sur ce interrogé, que il a plusieurs fois ouï dire audit lieu de la Roche d’Anjoux, à Aubusson, à Pontgibault et ailleurs que le baron de la Borne a longtemps entretenu et entretient encore de présent la prieure de Blessac, et que ledit baron pour ces causes a souventes fois maltraité sa femme, en sorte qu‘elle a été contrainte le laisser et abandonner. Dit aussi qu’il était audit Pongibault et vit quand la femme dudit baron y passa et s’en allait, après qu’elle eut été contrainte de laisser sondit mari, comme dit est. Dit outre ledit déposant que, qui irait jusques à Rome, qu’on ouïrait parler de la mauvaise vie et méchant gouvernement desdites religieuses de Blessac

Pour lesquels désordres, dissolutions, malversations et abus mentionnés et plusieurs autres causes à ce nous mouvant, avons fait l’ordonnance dont la teneur s’ensuit :
Nous, frères François Pelletier et Jehan Lamy, prêtres religieux réformés de l’ordre de Fontevrault, suivant la commission à nous adressée par notre très révérende mère abbesse madame Renée de Bourbon, en ensuivant l’arrêt de la cour du Parlement de Paris, nous sommes transportés au prieuré de Blessac dudit ordre et icelui visité, enquis et informé, comme mandé nous était : auquel nous avons trouvé un merveilleux désordre et plusieurs fautes difficiles à corriger, partie desquelles avons secrètement rédigé par écrit, tellement que ledit prieuré ne peut bonnement,
[… manque deux pages …]
révérende dame et mère abbesse, publier ou la faire publier et signifier auxdites religieuse, m° Jehan d’Aubusson et tous autres qu’il appartiendra, et leur enjoindre et commander icelle dite ordonnance tenir et entretenir et accomplir de point en point selon sa forme et teneur. En témoin desquelles choses nous avons signé ce présente notre procès verbal, fait les jour et an que dessus. J. LAMY – F. PELLETIER
 
 

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