Le Courrier du Centre
Année 1877

 
Samedi 27 janvier 1877
Un loup tué dans la forêt d’Aigueperse, commune de Saint-Bonnet
Jeudi 15 février 1877 - Voir l'original
Un horrible assassinat vient de mettre la consternation dans le village de Mazermaud, commune de Linards. Nous recevons à ce sujet les détails suivants :
La demoiselle Marie Cluzaud de ce village, s’était mariée lundi dernier, 12 courant, avec un nommé Faure ; elle avait dit-on, fait promesse de mariage à un autre jeune homme appelé Jean Célérier ; ce dernier, voyant qu’elle ne tenait pas sa promesse, lui avait, dit-on, promis de se venger, si elle en épousait un autre. Aussi, lundi soir, au moment où tous les gens de la noce étaient à la danse, et où chacun ne cherchait qu’à se divertir, Jean Célérier vint se poster derrière une fenêtre de la salle de danse et , lorsque la nouvelle mariée fut à proximité de lui, il tira sur elle un coup de revolver qui l’atteignit entre les épaules, la balle vint sortir par devant au côté gauche.
Monsieur Tarrade fils, médecin à Châteauneuf, fut aussitôt appelé et prodigua ses soins à la blessée, et malgré la gravité de la blessure il espère la sauver.
La gendarmerie de Châteauneuf fut bientôt informée du crime, et M. Dutournier, brigadier, ainsi que deux de ses gendarmes, se rendirent au village de Mazermaud ; leurs recherches pour trouver l’assassin furent d’abord infructueuses, mais on dit à M. Dutournier que l’on avait entendu plusieurs coups de revolver dans la nuit, il comprit que l’assassin ne devait pas être éloigné du village et qu’il était probablement resté aux environs pour savoir si sa victime était morte.
Il prit alors une autre direction et ne tarda pas à découvrir l’empreinte de ses pas ; il le suivit ainsi, secondé de ses gendarmes, à une distance de trois kilomètres. Célérier aperçut les gendarmes et voyant qu’ils reconnaissaient l’empreinte de ses bottes, il les enleva, mais son idée ne fut pas bonne, var M. Dutournier comprit de suite sa ruse et fit suivre la nouvelle piste.
Un instant après on le vit sauter une haie, et aller se cacher dans le coin d’un pré, il fut toujours suivi par le brave brigadier et ses deux gendarmes. En arrivant près de lui, ils entendirent un coup de revolver, l’assassin venait de chercher à se tuer, mais il ne se fit qu’une blessure au dessous du menton, qui, d’après le médecin, n’est pas grave.
Il fut immédiatement conduit et sous bonne escorte à l’hospice de Limoges
Quand à la victime de Célérier, son état est satisfaisant
Samedi 24 février 1877 - Voir l'original
On nous écrit de Châteauneuf, le 22 février 1877 :
« Monsieur le rédacteur,
je suis heureux de vous informer que Marie Cluzaud, la victime de l’assassinat que vous avez raconté, est aujourd’hui complètement guérie. Il n’est survenu aucun accident depuis l’extraction de la balle qui, pénétrant à l’angle inférieur de l’omoplate gauche, était venue se loger au creux de l’estomac. Il est hors de doute que le poumon a été touché par le projectile, mais qu’aucun vaisseau important n’a été atteint.
Toute la commune de Linards s’intéresse au sort de cette jeune femme qui, parée de toutes des grâces de la jeunesse, avait failli perdre si tristement la vie le jour même de son mariage. Sa guérison occasionne une satisfaction générale. »
Lundi 26 février 1877 - Voir l'original
Avant-hier, nous annoncions la guérison de Marie Cluzaud, la victime de la tentative d’assassinat que nous avons racontée dans notre numéro du 16 courant. Le même jour, l’assassin, Jean Célérier, qui s’était, on se le rappelle, tiré un coup de revolver sous le menton et avait été transporté à l’hospice de Limoges, succombait à sa blessure. Son corps a été transporté à Linards.
Mercredi 3 octobre 1877 - Voir l'original
Elections législatives du 14 octobre
Nous avons reçu communication de la circulaire suivante, adressée par M. Chaussade, aux électeurs de la 2° circonscription de Limoges :
Mes chers compatriotes,
[…] Pour obtenir ces suffrages, je sais qu’il faut des titres. Or, quelques modestes que soient les miens, vous me permettrez de les puiser dans ma qualité d’enfant du pays, d’enfant du pays né dans la Haute-Vienne, de descendant d’une vieille famille de ce département, d’une famille dont les principes d’équité et de droiture n’ont jamais varié.
Vous me permettrez, candidat à une élection législative, de me prévaloir des études sérieuses que j’ai faites de la législation et du droit, études attestées par la plus rare récompense que les Facultés puissent décerner.
Vous me permettrez, candidat dans votre circonscription, d’invoquer les fonctions publiques que j’exerce au milieu de vous, et que je dois aux sympathies les plus pures de mes concitoyens, mon mandat de conseiller général, mandat que m’ont confié sous l’empire tous les partis sans exception, le parti libéral en tête, mandat que m’ont renouvelé sous la République tous les partis encore, les républicains les premiers, mandat que j’ai conservé jusqu’à présent malgré toutes les promesses de hautes places rétribuées que des personnages puissants m’avaient offertes en échange, comme s’ils avaient eu besoin de mes dépouilles pour s’en parer, mandat que je n’échangerais pas pour tous les millions du monde. Vous me permettrez de me recommander devant vous de mes bonnes intentions, de cet esprit de justice et d’impartialité pour tous dont je suis pénétré, de mon désir, de ce désir ardent et non satisfait encore que j’éprouve d’acquérir plus de force pour faire plus de bien ; car le bien, le bien public, c’est là mon ambition, c’est ma seule ambition, comme ce fut celle de mes aïeux qui, riches jadis entre tous, ont passé leur vie à récolter leur ruine en semant leurs bienfaits, et qui, héritiers d’un blason sans tache, ont, ne tenant qu’à celui du cœur, brûlé celui des titres sur l’autel de la liberté.
Vos pères vous ont dit la popularité de ces hommes qui, seigneurs puissants aux siècles derniers dans une province voisine, alliés à la Maison de France, répudièrent droits et vassaux pour venir en Limousin se constituer les vassaux du peuple, vassaux du peuple, ai-je dit, mais seigneurs toujours, seigneurs des seigneurs eux-mêmes par la noblesse de leurs sentiments et d’extrême bonté de leur naturel. Ils vous ont dit les services rendus dans vos campagnes, dans ces campagnes notamment qui composent les cantons de Pierre-Bufffière et de Saint-Léonard aujourd’hui, par ces généreux philanthropes qui, tous de père en fils, bourrés de droit et de probité, docteurs ès-lois et ès-cœur, ne cumulaient, avant 89, chacun quatre fonctions publiques, la justice en tête, que pour être quatre fois utiles au paysan, au malheureux paysan, dont la misère, dont l’ignorance, dont les besoins étaient si grands. Ils vous ont dit de quelle affection générale, de quelles sympathies unanimes, de quel culte en quelque sorte était entouré l’un d’eux, mon aïeul Jean-Louis de Chaussade, administrateur du département de la Haute-Vienne sous la Révolution, homme distingué s’il en fut, dont Marmontel, son précepteur, forma l’esprit, dont le moral était formé d’avance en noble citoyen, que tous les cœurs portaient en tête de toutes les listes, quand sonna l’heure de la mort, que la mort, la mort injuste frappa adolescent, que la mort seule empêcha de siéger dans toutes les assemblées de l’époque, à côté de ses proches, de ses amis, qui tous, sauf Mirabeau, lui étaient inférieurs par le talent, et pas un, à coup sûr, supérieur à lui par le caractère
Oui, j’ai une ambition, c’est celle de marcher sur ces belles traces ; oui, j’ai une ambition, c’est celle de continuer ces traditions vénérées.
Je suis républicain, je vous l’ai dit, je suis républicain convaincu, mais je suis conservateur avant tout, avant tout l’ami du peuple, du petit peuple, avant tout l’ami du paysan, de mon vieux paysan qui fut toujours mon plus zélé champion au champ d’honneur électoral, et m’a toujours défendu si chaleureusement à la barre, la barre sacrée du suffrage universel.
Je suis républicain, républicain conservateur, cela veut dire que je veux l’affermissement de la République par le calme, par la modération […]
[…] La guerre ! grand Dieu ! mais il n’y a rien au monde de plus affreux, de plus insensé. La guerre ! mais je vous avoue, si vous me permettez cette allusion personnelle, je vous avoue que je me crois aussi méritant, aussi glorieux d’avoir, durant mes cinq ans de service militaire, dans les diverses garnisons que j’ai suivies, fait supprimer, au bénéfice de la santé des hommes, des postes oiseux ici, des sentinelles inutiles là, que si, pendant mon congé, j’avais tué à la guerre trente-six hommes et la moitié d’un.
De mauvaises gens vous diront, car elles l’ont dit déjà, que je pousse peut-être l’horreur de la guerre un peu loin, que cette horreur peut aller, sans façon, le cas échéant, jusqu’au mépris des lois, qu’un exemple frappant s’en est vu, que les hommes mariés de trente à quarante ans, appelés lors de la dernière guerre à passer la révision d’abord, et à partir ensuite, n’ont pu faire ni l’un ni l’autre, et cela par ma faute, et cela par une excitation tacite, mais évidente à la rébellion. Ai-je contribué pour ma part au retrait de l’ordre d’appel des hommes mariés de cette catégorie, suis-je pour quelque chose dans l’abandon de cette levée nouvelle de troupes, suis-je un peu la cause si les hommes mariés n’ont pas été mis en route ? C’est possible : je n’en sais rien. Mais ce que je sais, c’est que je ne suis l’auteur d’aucun trouble ; ce que tiens à relever, c’est cette imputation indigne d’avoir trempé, soit par la pensée, soit par l’action, dans la résistance et dans le désordre qui l’a signalée. Oui, je me suis récrié contre l’appel des hommes mariés, oui j’ai protesté contre la continuation de la guerre, comme j’avais protesté contre le commencement de la guerre elle-même ; oui, j’ai dit tout haut qu’avant d’enlever à leurs familles de nouveaux soldats, il fallait utiliser ceux, déjà assez nombreux, Dieu merci ! qu’on avait sous la main ; oui j’ai ajouté que toute chose mal commencée doit mal finir ; oui j’ai écrit lettres sur lettres, pétitions sur pétitions, observations sur observations, aux ministres d’alors, pour les conjurer de ne pas continuer la guerre et de rapporter cette décision, comme j’avais fait auprès des ministres de l’empire, pour les exhorter à ne pas courir cette exécrable aventure ; oui j’ai pensé ; oui j’ai parlé ; oui j’ai écrit ; mais de là à la résistance, à l’approbation de la résistance ; mais de là à la révolte, à l’encouragement de la révolte, il y a loin ; car pendant que les actes regrettables auxquels on fait allusion se passaient, quand la révision était entravée, quand l’autorité était outragée, quand le Christ était précipité de son trône, quand l’Etre-Suprême était renversé dans son image, quand Dieu lui-même, quand Dieu roulait, passif sous le pied sacrilège de quelques égarés, ma bouche s’ouvrait pour calmer, et mon cœur, mon cœur toujours le même, s’inclinait tout à la fois, humble et respectueux, et devant la justice humaine qui frappait, et devant la justice divine qui pardonnait […]
[…] mon cabinet sera ouvert trois jours de la semaine à Limoges, aux cantons d’Aixe, Laurière et Nieul, et les quatre autres jours aux quatre cantons de Pierre-Buffière, Saint-Léonard, Eymoutiers et Châteauneuf, à Linards, point central pour eux […]
[…] union et paix, progrès et concorde, droit et justice, religion, patrie et liberté, voilà mon programme ; République, voilà mon drapeau !
Aubin Chaussade
Avocat à la Cour d’Appel de Limoges, membre du conseil général de la Haute-Vienne
Linards (Haute-Vienne), le 27 août 1877
Mardi 16 octobre 1877
Election législative :
Ninard
Républicain
Broussaud
Candidat officiel de Mac-Mahon
 De Peyramond
Monarchiste
Chaussade
Inclassable
Circonscription 10 024 3 693 541 151
Linards 251 34 1 67
Châteauneuf 201 70 3 2
St-Méard 17
N.B.: Dans toutes les autres communes, Chaussade a de 0 à 5 voix
Mercredi 24 octobre 1877
Candidatures au poste de conseiller général du canton de Châteauneuf
Chaussade (sortant), et Firmin Tarrade, pharmacien et adjoint au maire de Limoges
Samedi 27 octobre 1877 - Voir l'original
Nous recevons communication de la circulaire suivante que M. Chaussade adresse aux électeurs du canton de Châteauneuf :
Mes chers compatriotes,
Lorsqu’aux élections législatives dernières je sollicitais vos suffrages, le sentiment qui m’inspirait était, s’il en fut jamais, un sentiment loyal et de nature à défier la calomnie comme la critique. Unir tous les partis sur le seul terrain propice : la République, en leur offrant un nom qui n’a rien fait, que je sache, pour être antipathique à aucun d’eux ; substituer, si vous le vouliez bien, à un nom qui vous est étranger, un nom qui vous appartient, telles étaient mes intentions, je n’en avais pas d’autres.
Or, ces intentions, si pures qu’elles fussent, ont été dénaturées à vos yeux, il faut le croire, ou tout au moins mal comprises, puisque les deux candidatures que le gouvernement et les Comités ont appuyées ont eu seules le privilège de parvenir à votre oreille, et que, perdue dans le bruit confus de l’agitation soulevée de part et d’autre, ma voix calme, ma voix sincère et conciliatrice est demeurée sans écho.
Je ne viens ici ni vous blâmer ni me plaindre d’un échec que je prévoyais, d’ailleurs, et dont vous me vengerez plus tard, j’en ai l’espoir, car, vous ne l’ignorez pas, c’est pour vous que j’ai voulu lutter dans la circonstance, ce n’est point pour moi.
Et de quoi me plaindrais-je en effet ? Ai-je perdu votre confiance ? Je sais que non. Ai-je perdu votre estime ? Votre estime est pour moi, j’en ai la certitude, aujourd’hui comme hier, égale, et ce n’est pas peu dire, au dévouement que j’ai pour vous.
Assuré donc de votre estime, je ne pouvais hésiter un instant, mes chers compatriotes, à vous demander le renouvellement de mon mandat de conseiller général, de ce mandat dont vous m’aurez ainsi honoré trois fois, et c’est avec la plus entière confiance que j’attends à cet égard l’expression de votre volonté, déjà connue.
Permettez-moi de vous rappeler que lorsque, il y a trois ans, la moitié du Conseil général de votre département fut soumise à la réélection légale, les quatorze membres qui composaient cette moitié y prirent leur place, et cela sans exception, puisque deux fils y ont remplacé leur père, puisque quatre démissionnaires ont assis de leurs propres mains, sur leur siège volontairement quitté, leur propre successeur. Permettez-moi de me rappeler à moi-même que les treize conseillers qui sont compris dans la moitié renouvelable cette année se sont, en se séparant au mois d’août, tendu une main fraternelle en se disant tous les uns aux autres : « Nous nous reverrons. »
C’est que ceux-là s’étaient fidèlement acquittés de leur tâche. C’est que ceux-ci ont le sentiment du devoir accompli ; c’est que tous ont apporté leur pierre à l’édifice ; c’est que chacun a contribué pour sa bonne part au progrès et aux belles choses réalisées depuis six ans dans la Haute-Vienne.
Sera-t-il dit que le canton de Châteauneuf sera le seul qui abandonne son représentant ?
Sera-t-il dit que ce représentant était un vil, un misérable citoyen ?
Sera-t-il dit que dans ces campagnes que j’aime et qui hier encore me chérissaient comme leur enfant, il se trouvera des hommes capables d’ajouter foi aux calomnies et aux mensonges des méchants et des lâches qui essaieront de me salir ?
Non, mes chers compatriotes, c’était pour vous qu’hier je voulais monter, c’est pour vous qu’aujourd’hui je ne veux pas descendre
Linards, le 18 octobre 1877
Aubin Chaussade, avocat, conseiller sortant.
Vendredi 2 novembre 1877 - Voir l'original
Candidature et profession de foi de Gabriel Noualhier, datée de Linards (rappelle qu’il a commandé les mobiles du canton en 1870) Cf. photo 1877-11-02.jpg
M. Gabriel Noualhier nous prie de reproduire la circulaire suivante qu’il adresse aux électeurs du canton de Châteauneuf :
Messieurs et chers compatriotes,
Vous êtes appelés dimanche prochain, 4 novembre, à nommer votre représentant au conseil général.
J’ai l’honneur de solliciter vos suffrages.
Enfant du pays, j’ai toujours vécu au milieu de vous ; la guerre elle-même ne nous a pas séparés, puisque j’ai eu l’honneur, comme commandant des mobiles du canton, de conduire au feu vos enfants et de partager leurs fatigues et leurs souffrances.
Fixé maintenant, et pour toujours, au milieu de vous, je puis me rendre compte, mieux que tout autre, de vos désirs, de vos intérêts, qui sont et seront toujours les miens.
Si vous m’accordez l’honneur que je sollicite, je serai sans doute à portée d’entendre et de connaître, chaque jour, vos vœux, vos réclamations ; et je puis vous assurer à l’avance que la modeste influence que pourrait me donner vos suffrages sera entièrement employée à satisfaire vos besoins.
Je ne demande rien et n’attends rien de personne, ni pour moi ni pour aucun des miens : vous pouvez donc compter sur mon indépendance la plus entière.
Fidèle aux lois de mon pays, je respecterai toujours le gouvernement légal de la France, et tous mes efforts tendront à soutenir énergiquement l’ordre et le gouvernement du président de la République.
Gabriel NOUALHIER
Linards, le 31 octobre
Mardi 6 novembre 1877
Elections cantonales
Inscrits 2833, votants 1749
Tarrade, républicain, 945, élu
Nassans (maire de Neuvic), républicain, 480
Gabriel Noualhier, conservateur, 284
A. Chaussade, (sans parti mentionné), 33
Vendredi 9 novembre 1877
Nomination de M. Mounier, instituteur titulaire à Linards

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