Le Courrier du Centre
Année 1883
Mercredi 17 janvier 1883
Circulaire du ministre de l’intérieur fixant les conditions de la réversion des pensions viagères (à 50%) aux veuves et descendants des victimes du coup d’état de 1851.
Vendredi 1° juin 1883 - Voir l'original
Tribunal de police correctionnelle – Audience du 30 mai 1883
Mutilation d’arbres – Jean Gavinet, âgé de 34 ans, propriétaire-cultivateur, demeurant à Sautour-le-Petit, commune de Linards, est accusé d’avoir coupé ou mutilé 31 arbres de différentes grosseurs.
Le sieur Jean Duroudier, âgé de 56 ans (il ne sait pas au juste son âge), propriétaire à Sautour-le-Petit, affirme au tribunal qu’en effet 31 arbres lui appartenant ont été soit coupés entièrement soit mutilés de façon telle que la plupart sont crevés ou crèveront dans un délai très court.
Comme pièces à conviction figurent 1° la hache quelque peu ébréchée qui a servi pour occasionner les dégâts, et qui s’adapte parfaitement avec les entailles faites aux arbres ; 2° un sabot du dit accusé concordant parfaitement avec les empreintes de pas constatées dans un champ voisin, où les dégâts ont été reconnus.
Malgré ces preuves accablantes, Gavinet soutient énergiquement n’être point l’auteur du délit ; il n’en est pas moins condamné à trois mois de prison, récompense bien méritée pour de pareils actes.
Mardi 19 juin 1883
Certificat d’études du canton de Châteauneuf, à Châteauneuf, le mercredi 13 juin
40 inscrits, 28 présents dont 20 garçons et 8 filles.
14 reçus, dont 10 de Linards, dont les 5 premiers :
Léonard Gilles, Guillaume Montagner, Angèle Léonard, Anna Bonnefond, Hippolyte Villette, Louis Debernard, Jean-Baptiste Labarre, Jean Cluzeau, Jean Durand, Léonard Couade.
Mardi 14 août 1883
Election au conseil général, canton de Châteauneuf, M. Adrien Tarrade, conseiller sortant élu.
Mercredi 5 septembre 1883
Comice agricole de Châteauneuf, nombreux prix à des linardais.
Vendredi 21 septembre 1883
Tribunal de police correctionnelle – Audience du 19 septembre 1883
« Un sieur Lagarde, demeurant à Linards, est condamné, pour outrage à un garde-champêtre, à 25 fr. d’amende.
Jeanne Meaumont, veuve Andrieux, âgée de 34 ans, demeurant à Linards, accusée d’avoir soustrait une certaine quantité d’avoine au sieur Cluzaud, est relaxée.
M° Baju présentait sa défense. »
Jeudi 25 octobre 1883 - Voir l'original
Un escroc
On nous écrit de Linards, le 23 :
Jeudi dernier, un individu se présentait au presbytère de Saint-Bonnet-la-Rivière, d’où M. le curé était absent.
« M. le curé de Saint-Paul, dit-il à la servante, m’envoie inviter son collègue de Saint-Bonnet à un dîner qu’il donne samedi prochain. »
Cette invitation valut, comme de juste, un bon dîner à celui qui la faisait.
Au moment du départ, le commissionnaire, prétextant diverses emplettes à faire, demanda à emprunter 5 fr. à la servante, disant qu’il avait oublié son porte-monnaie.
Cette demande éveilla la défiance de la servante, qui lui répondit par un refus.
Le lendemain, le même individu allait à Méras, commune de Linards, entrait dans la plupart des maisons, et rencontrait dans une ferme une femme malade ; après s’être informé avec intérêt de sa santé, il lui prescrivit divers médicaments qui devaient infailliblement la guérir, et finalement il demanda à lui acheter des poulets. Malheureusement la malade n’en eut pas, sinon elle aurait été bien heureuse de lui en donner une paire.
Chez le sieur Faucher, il ne rencontra que la maîtresse de maison ; il avait soin, d’ailleurs, d’éviter les maisons où il aurait pu trouver des hommes : « M. Chabaudier, dit-il, a appris que vous aviez de bons canards, et m’envoie pour vous en demander deux : il en a un pressant besoin, car il donne un dîner demain ; quant au prix, il vous les paiera ce que vous voudrez. »
Comme la mère Catissou hésitait : « Ne craignez rien, ajouta-t-il, je suis cousin de M. Chabaudie et un grand ami de votre instituteur ».
Catissou, complètement rassurée alors, se hâte de rassembler sa volaille, et s’empare de ses deux plus jolis canards :
« J’ai aussi un lapin bien gras, dit-elle, le voulez-vous ? Non, pas pour le moment, répond le filou ; je reviendrai probablement demain, et je prendrai le lapin et des poulets ».
A peine était-il parti qu’une voisine plus défiante effraya la bonne métayère qui se mit aussitôt à la poursuite du voleur, accompagnée de quelques voisins armés de bâtons. On rencontra un boulanger en voiture ; on lui donna le signalement de l’escroc, en lui recommandant de lui reprendre les canards s’il le rencontrait.
Il le trouva en effet à l’entrée du bourg de Linards. Le malheureux voleur ne se le fit pas dire deux fois : il déposa les canards et s’enfuit à travers champs.
Mercredi 31 octobre 1883 - Voir l'original
Le Petit Centre publie la lettre suivante qu’il a reçue de Linards et qui prodigue de bons et sages conseils que nos populations ouvrières devraient bien méditer et suivre :
Linards, le 27 octobre.
Monsieur le rédacteur,
Je viens vous demander, en qualité d’abonné à votre journal, de vouloir bien publier l’article suivant que je consacre exclusivement aux ouvriers des villes en vue des prochaines élections :
C’est avec une profonde tristesse que je lis dans votre journal le compte rendu de réunions anarchistes d’ouvriers et corporations, etc.
Le but de ces réunions, somme toute, est excellent : resserrer les liens de solidarité, maintenir la bonne harmonie entre les différents corps d’état, émettre des idées en vue de l’amélioration du travail, voire même la politique.
Mais généralement, je le constate avec regret, ces réunions ne donnent pas le résultat qu’on serait en droit d’en attendre.
Les orateurs emploient les termes les plus violents à l’adresse du gouvernement, sous prétexte qu’ils ne sont pas aussi heureux que le demande leur ambition : le commerce traverse une crise dont le ministère est responsable, les salaires sont insignifiants, la vie est chère et finalement, on ne peut vivre. Tels sont les arguments journellement employés et grossis, brodés de paroles injurieuses, qui vraiment font peine. De là les grèves et le chômage.
Ce n’est pas le vrai moyen, Messieurs les ouvriers des villes, d’arriver à l’amélioration de votre sort.
Ne chômez pas tant les lundis, mardis, et autres jours ; ne perdez pas votre temps à préparer votre talent oratoire pour les réunions, cherchez moins de thèses nouvelles à présenter et à soutenir, soyez assidus à l’atelier, ménagez votre salaire, et le bien-être et des sentiments meilleurs auront bientôt pris place au foyer.
Prenez l’habitude de la maison, fréquentez moins les débits et vous verrez que peu à peu vos économies grandiront et, le sou ajouté au sou, votre capital grossira, et le moyen que vous cherchez pour améliorer votre sort vous l’aurez trouvé sans vous en être aperçus.
L’ouvrier des campagnes, le gros paysan, chaussé de lourds sabots, vêtu de haillons que vous ne voudriez seulement point toucher, nourri du vilain pain bis, aurait bien quelque chose à dire si les paroles et les récriminations rendaient la position meilleure. Mais il est patient, le bon Jacques, il paie annuellement ses impôts sans cesse augmentés, et s’il laisse échapper quelques soupirs ou quelques exclamations, personne ne les entend.
Il travaille sept jours par semaine du matin au soir, souvent la nuit, au soleil ardent, à la pluie battante, au froid ; jamais il n’est découragé et est toujours gai et content.
Cependant le commerce ne va pas bien non plus, son bétail ne se vend pas, le marché aux grains est ruiné par l’importation ; il a des pertes qui le ruinent : les incendies, la grêle, la gelée.
Mais le paysan, ignorant et bête, a pour lui une bonne maxime, que les ouvriers des villes devraient adopter : « Garder une poire pour la soif et se mesurer avec son aune ».
Tout paysan que soit ce vieux dicton, j’aime à croire qu’il est assez clair pour être compris et je souhaite qu’il soit mis en pratique par ceux qui, jusqu’à présent, ont négligé de songer à l’avenir et n’ont pas calculé le chiffre de leurs dépenses sur celui de leurs économies.
Un peu moins de tapage, messieurs, s.v.p., travaillez un peu plus, dépensez moins et surtout songez que la République de 1848 a été renversée par vos devanciers, et combien il serait triste d’avoir à vous reprocher une semblable faute, le cas échéant, en ayant l’exemple sous vos yeux.
Faites donc la politique uniquement à coups de bulletins. Unissons nos efforts, marchons la main dans la main, pour soutenir et proclamer la République, mais la République que nous ambitionnons : forte, sage et prospère.
Le surplus arrivera : soyez discrets, prudents et confiants.
X.

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