Le Radical du Centre
Année 1885
Vendredi 22 mai 1885 - Voir l'original
Linards
Le 10 mai, vers huit heures, tous les habitants de Glanges et des environs étaient vivement alarmés par une immense lueur qu’ils prenaient pour un incendie paraissant avoir son foyer à Linards. Plusieurs d’entr’eux se dirigeaient même vers cette localité pour prêter leur concours, lorsqu’ils rencontrèrent sur la route le sieur R…, qui leur apprit que ce qu’ils prenaient pour un incendie était la lueur d’un feu de joie monstre.
Le matin même de ce jour, M. Gavinet, adjoint du maire de Linards, avait été chargé de signifier à M. Ledot, ex-maire de Linards, sa suspension pendant un mois, en raison de ses agissements illégaux.
La nouvelle se répandit bien vite dans cette petite bourgade si républicaine, et chacun s’empressa en toute hâte de faire des préparatifs pour improviser une véritable fête.
Pas de fête sans feu de joie à la campagne : on décida donc qu’on ferait un feu de joie.
Les victimes du coup d’état, - auxquels M. l’ex-maire avait voué, pendant sa courte gestion, une haine farouche, - ont eu bien vite couvert une souscription destinée à illuminer Linards par une flambée formidable.
Aussi, le soir, une foule joyeuse, tambour et garde en tête, précédée des victimes du coup d’état, se rendit au champ de foire, en face de l’école de filles, où le feu était dressé.
A huit heures précises, le plus âgé d’entr’eux a allumé le feu aux cris unanimes de « Vive la république ! A bas les bonapartistes ! »
Après cette flambée monstre, le vieux C… a traduit, dans une allocution excellente, au nom de tous, la gratitude de la commune de Linards tout entière, envers l’administration préfectorale, pour l’excellente mesure qu’elle venait de prendre en les débarrassant de ce bonapartiste, ennemi juré des unions matrimoniales.
L’ami Gardias a lu ensuite une amusante pièce de vers patois. Nous regrettons que notre format ne nous permette d’en publier que le refrain :
 Quan votrei tournarei voutâ,
 Paubreis badaus de cousseliers,
 Gardâ vou bien de nommâ
 Loù vier pio blan ni mei N…..er !
 Fa ..fagei si vou ei de la râ…râcinâ !
 Ma ne vou lâ laissei pâ tirâ !
Avant de se séparer les habitants ont fait une collecte pour indemniser le tambour de ville qui sera chargé de donner une aubade, une heure avant le scrutin, le jour de la prochaine élection du maire, à chacun des conseillers qui, en arrivant après l’heure, avaient laissé nommer M. Ledot.
R…
_______

Nos amis de Linards peuvent recommencer leur petite fête.
Nous apprenons au dernier moment que par décret du Président de la République, M. Ledot, qui avait été suspendu pour un mois par M. le Préfet, a été révoqué de ses fonctions.
Nous rappelons qu’aux termes de l’art. 12 de la loi municipale de 1884, tout maire révoqué ne peut être réélu d’un an.

Samedi 30 mai 1885 - Voir l'original
Linards
Par arrêté daté d’aujourd’hui, M. le préfet de la haute-Vienne vient de convoquer le Consiel Municipal de Linards, à l’effet de nommer un maire, en remplacement de M. Ledot, révoqué.
La convocation est faite pour le 7 juin.
Avis au tambour !
Samedi 6 juin 1885 - Voir l'original
Linards
Ainsi que nous l’avons annoncé, il y a quelques jours, l’élection d’un maire devant remplacer M. Ledot, l’ennemi des mariages, sinon des contrats, aura lieu le 7, dans cette petite localité.
Les intrigues des adversaires de la république ont commencé ces jours derniers, et il est probable qu’elles se sont exercé de toutes les façons.
Nous n’avons par à patronner tel ou tel candidat, mais nous avons le droit de donner notre avis aux membres du conseil municipal, dans l’intérêt général.
Il est bon aussi de faire connaître les agissements de MM. les réactionnaires.
Mardi 9 juin 1885 - Voir l'original
Linards
« Obligés d’avancer un peu le tirage du journal, nous avons reçu hier soir la dépêche suivante un peu trop tard pour la publier dans notre numéro d’hier : »
Châteauneuf, 4 heures
Gavinet, adjoint, est élu maire de Linards par 12 voix sur 13 votants, 1 bulletin blanc.
En nommant M. Gavinet, nos amis de Linards ont donné leurs voix à un républicain sincère et convaincu, ainsi que nous le leur demandions.
Les intrigues et les menées jésuitiques des adversaires de la République pouvaient surprendre une fois le Conseil municipal républicain de cette commune.
Le passage à la mairie de M. Ledot aura servi à démontrer avec plus d’éclat ce que nous avons dit bien des fois, qu’en arrivant aux affaires, les réactionnaires de tous poils n’avaient d’autres préoccupations que celles de tracasser les gens ne partageant pas leur manière de voir.
Quoi qu’il en soit, nous sommes heureux de voir l’élément républicain reprendre direction de la mairie dans une commune si républicaine.
Si certains personnages politiques avaient plus en vue l’intérêt général que la satisfaction de leurs petites visées électorales, de semblables hontes nous auraient été épargnées.
La commune de Linards ne tardera pas à retrouver sa tranquillité et son calme habituels, que les hommes d’ordre lui avaient fait perdre.
L’élection d’un adjoint, en remplacement de M. Gavinet élu maire, aura lieu probablement dans 15 jours.
Nous en reparlerons.
Samedi 20 juin 1885 - Voir l'original
CHRONIQUE DEPARTEMENTALE
Linards
On nous écrit :
Le maire réactionnaire de Linards n’est plus, mais il a laissé dans la place son ancien garde qui est très dévoué aux réactionnaires et aux cléricaux.
Dimanche dernier il a déployé un zèle des plus louables pour faire nettoyer les rues et embellir les maisons de Linards.
Reste à savoir si la nouvelle municipalité appréciera autant ses services en pareille matière que ses anciens maîtres. Quoi qu’il en soit, il est certain que les services de cette nature étant bien rétribués et bien arrosés par le curé, on ne peut raisonnablement pas demander au garde d’abandonner des bénéfices aussi avantageux et aussi agréables par les chaleurs tropicales des jours derniers.
Vendredi 26 juin 1885 - Voir l'original
CHRONIQUE DEPARTEMENTALE
Linards
Depuis que nous avons un maire dévoué de tout cœur au gouvernement démocratique, la commune a déjà bien changé de face.
On a déjà organisé une fête pour le 14 juillet. Un banquet auquel assisteront un grand nombre de citoyens et de patriotes aura lieu le 14 au soir.
Il y a bien longtemps que cette commune si républicaine n’avait pas fêté la prise de la Bastille, la forteresse de la royauté. La commune est toute heureuse d’avoir cette fois-ci pour administrateur un républicain sincère et non une de ces girouettes que le vent tourne à son gré.
Notre garde lui-même, pris d’un beau zèle, fait souscrire à une loterie d’objets en ruolz, destinée, nous assure-t-on, à concourir aux frais de la fête du14 juillet.
Il nous devait bien cette compensation pour le zèle qu’il a déployé pendant les processions.
On nous assure que M. le curé lui-même a pris des billets.
R.
N.-B. – Dimanche dernier, notre administration municipale a été complétée par la nomination, comme adjoint, de M. Crouzilhac, en remplacement de M. Gavinet, élu maire.
R.
Vendredi 10 juillet 1885 - Voir l'original
La Croisille
Monsieur le rédacteur,
Je m’empresse de vous signaler un fait qui pourra peut-être intéresser vos nombreux lecteurs :
Samedi dernier, le sieur Fressingeas se rendait à la foire de Linards pour y faire quelques achats, et, poussé par la soif, il entre dans une auberge pour s’y rafraîchir.
La personne qui se trouvait avec lui, ayant refusé de boire du vin, il crie à la bourgeoise d’apporter une bouteille de bière et un tire-bouchon. Malheureusement le tire-bouchon résista à ses efforts réitérés.
Alors Fressingeas, à bout de ressources, saisit la bouteille par le col et en frappa de toutes ses forces sur la table; la bouteille vole en éclats, et vient lui faire une forte blessure au poignet.
Bien qu’éloigné de plus de 9 kilomètres de tout médecin, il se rend à La Croisille, tout en perdant beaucoup de sang, pour s’y faire soigner.
Le docteur Blanc fit la ligature de l’artère, et lui posa quelques points de suture en fil d’argent.
Grâce aux soins diligents de l’honorable docteur, le blessé va aussi bine que possible, et on espère que dans un mois il sera complètement guéri.
Dimanche 27 septembre 1885 - Voir l'original
LINARDS
La liste radicale est très bien accueillie partout, et nous sommes certains d’avoir une très grande majorité, comme dans tout le canton du reste, d’après les renseignements que nous recueillons.
Les opportunistes locaux, qui semblent faire leur deuil des votes de notre région, ont cherché à effrayer les campagnards en leur disant que les candidats radicaux auraient peut-être la majorité dans le canton de Châteauneuf, mais qu’ailleurs la liste opportuniste triompherait, et qu’alors ceux qui auraient voté pour les radicaux seraient bien embarrassés pour faire défendre leurs petits intérêts.
Cette insinuation qui ne troublait, il est vrai, que les partisans du scrutin d’arrondissement, a été dissipée quand ils ont eu pris langue aux foires voisines avec les électeurs des autres cantons. Aujourd’hui ils sont disposés à marcher comme un seul homme.
Bon nombre d’autres, partisans de ceux qui doivent arriver, tourneront avant la fin de la période électorale et feront plus de bruit que les autres.
Samedi 8 octobre 1885 - Voir l'original
CORRESPONDANCES ELECTORALES
LINARDS
Succès assuré, ainsi que je vous l’avais annoncé.
Tous les campagnards veulent voter pour les radicaux, car ils veulent tous des réformes.
La question du Tonkin et celle de l’impôt, qui frappe aujourd’hui plus les petites bourses que les grosses, les ont mis complètement avec nous. Malgré la propagande que je vous ai signalée, les opportunistes seront battus. On ne parle pas des monarchistes, tant ils ont peu de chances.
Samedi 24 octobre 1885 - Voir l'original
Résultat des législatives
Linards – (Inscrits, 569 – Votants, 405)
Perin  282  De Léobardy 121
Lamazière 282  Delille  116
Pressat  282  Demonts 120
Ranson  282  Noualhier 118
Planteau 282  Frebault 109

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